Illusions et Tempêtes
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I (8) - Miroirs inversés.

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Message par Carigän Funéra Jeu 4 Jan - 22:46

Le crépuscule tombe, dans la chambre à coucher. Il est tôt, et nombres de silhouettes demeurent cristalisées alors que les lumières s'estompent. Seules d'antiques âmes s'ébrouent, seuls de vieux esprits sortent des ombres. Le visage du Roi Illusionniste semble un moulage de plâtre aux traits inertes, inhabités. Des ébats de la veille, la longue torpeur a chassé les dernières chaleurs qui s'étaient embusqués au fond de leurs muscles, les derniers escarbilles logées sous leurs peaux. La torpeur les a comme enveloppés d'une pellicule de verglas. La torpeur les a minéralisés, figeant leurs membres entrelacés dans un albâtre de statue grecque. Ils sont rêveurs foudroyés. Ils sont amants abandonnés par le destin. Ils sont une oeuvre d'art sculpurale vouée à un sanctuaire maudit.

Deux paupières se lèvent. Deux paupières affutées qui taillent l'air. Un mouvement fluide et soudain, comme issu d'un mécanisme à ressort. Deux prunelles-crevasses défient les temps, fixent un point imaginaire fiché dans une voûte fictive. Deux battements de cils. Quelques mouvances encore subtiles et profondes, dans le marbre de sa chair. Ses phalanges qui semblent s'arracher à une emprise de glace, qui font craquer un sortilège de pétrification. Ses doigts qui s'animent, qui se meuvent, qui explorent la peau qu'ils ont consolés tout le jour durant.

Ses souvenirs s'escamotent dans une laitance de brumes. Il ignore s'il a rêvé la Fusion. Il ignore s'il a déliré, s'il a sombré dans une fièvre mystique comme peut en voiler les tentures de son esprit. Son corps est si froid, encore emprunt de sa lourdeur de gisant, que les éclats de souvenirs qui lui reviennent semblent une robe d'Arlequin, une pure fantaisie. Méfiance. Un pas de velours, esquissé dans le monde qui l'accueille, tout fumant de ses mystères. Un pas de loup, dans la réalité qu'il ne méconnaît que trop bien. Lentement, sans qu'il ne bouge, ses prunelles roulent dans leurs orbites. Ses prunelles passent en revue chaque angle de la pièce, chaque droite et chaque segment de cette géométrie. Grinçante. Il ne bouge pas. Il fait partie, de cette toile d'araignée. Il est un fil de soie et un esprit de verre. Ses prunelles cherchent les ombres, les failles et les viviers. Ses prunelles cherchent les secrets, les monstres et les phobies qui ont revêtu des courants d'air.

Il casse l'espace. Se redresse brutalement. Un électrochoc étrillant ses flancs. Une sensation de souffle coupé. D'un bras, il retient in extremis la petite silhouette lovée contre lui, qu'il n'avait pas remarqué, ou à peine. Qui semblait une partie de son corps. Un organe sage et chuintant. Il la retient, la serre et dévisage, embusqué derrière la ligne de son épaule abandonnée, les reliefs de mâchoires béantes qui les environnent. Lui vient la fragrance d'un parfum, qui vient de sa nuque, à Elle. Qui prend naissance à la jonction de sa peau duveteuse et de sa chevelure, auburn dans le crépuscule bleu. Il l'attire davantage contre lui, refermant ses bras sur le buste lâche, calant sa tête lourde dans le creux de son épaule. Elle semble une ancre. Elle a la lourdeur de la fonte, mais les frimas de sa peau sont la peluche des lichens qui envahissent les forêts boréales. Elle est un Talisman. Un Talisman contre l'horizon qui s'effondre, contre les gouffres qui enflent, contre les bêtes sans instincts. Carigän ferme les yeux, s'ouvrant aux messages qui remontent sa peau. Tâchant de faire fi des murmures et des chuintements. Carigän ferme les yeux, joue au funambule sur les sensations infimes qui affleurent des buées. Au dehors, la nuit se lève.
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Message par Diane Mansiac Ven 5 Jan - 10:02

Le coucher du soleil qui embrase le ciel de ses orangers les plus soutenus. Le crépuscule qui s'illumine lentement des violets et indigo les plus plus intenses . Ce sont deux explosions de couleurs que la Flamme ne peut contempler, blanche neige endormie dans son cercueil de cristal. L'emprise du Jour n'a pas encore totalement desserré ses griffes immuables sur l'esprit de la jeune cainite.  Il faudra encore de longues secondes avant que sa conscience ne papillonne et ne revive de sa mort quotidienne.

Elle garde les yeux clos.  Laissant ses sensations renaitre pleinement avant de s'ouvrir à la nuit. Délicatement, elle étend les ailes de son Aura en même temps que son épiderme tintinabule sous un poids étranger, sous un contact qui ne lui est pas familier. Son âme bondit farouchement sous cette réalisation. Sous les implications qui incendient sa peau. Il est resté! Sa tête repose paisiblement sur lui et son bras entoure sa taille, la maintenant contre lui, le maintenant contre elle. Avec la langueur de la Torpeur qui se dissipe lentement, elle pivote dans son enlacement d'oiseau pour lui faire face. Elle se redresse, et sans se dégager totalement, vient s'assoir face à lui, ses jambes agenouillées encadrant ses hanches. Les doigts d'une main se perdent sur son front, caresse les reliefs farouches de son visage. Besoin imperieux de le toucher, de définir la nuit qui s'ouvre par les parfums de son corps. Ce n'est que maintenant qu'elle ouvre les yeux. Qu'elle le regarde et lui sourit.

Son regard est celui d'un ciel de printemps, tout juste lavé par la pluie. Frais, pur de tout nuage, éclairé par un soleil renouveau.  Son sourire trahit le plaisir intense qu'elle éprouve à se réveiller dans ses bras. A savourer ses premiers instants de Vie en sa compagnie. Il ne peut le savoir, depuis son étreinte, elle compte sur les doigts d'une main les Eveils où elle n'était pas seule. Refus de gâcher ces moments précieux dans la médiocrité. Les Tigres ne comptent pas... Elle louvoie sur son corps. A peine. Juste pour atteindre ses lèvres. Un baiser framboise. Aucune précipitation, aucune faim. La douceur de ses lèvres pour ses lèvres.

-Bonsoir mon Etoile.

Envie de Sang. D'une cigarette. D'aller contempler la Nuit à sa fenêtre. D'une douche. Ses rituels nocturnes qui rythment ordinairement les premières minutes de son Eveil.  Ils n'ont aucune importance devant le vertige qui la saisit à se reveiller à ses côtés. Un autre sourire. Plus léger. Plus mutin. Petille.

-Je risque de prendre gout à ta présence à chaque Eveil.
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Message par Carigän Funéra Ven 5 Jan - 22:24

Elle s'anime déjà. Le temps semble difforme, boursouflé. La pensée de partir l'effleure à l'instant où il sent, contre lui, le corps de l'Amazone se mouvoir, se dénouer, se défaire de son manteau de stuc. Son corps. C'est peut-être le seul indice dont il dispose pour rebâtir la Réalité, c'est peut-être la première pierre du tangible. C'est peut-être la seule lanterne, qui rayonne faiblement dans les brumes, l'invitant à suivre un zigzag aveugle. A moins qu'elle ne soit une Ruse. Un leurre. Un appât. Un magnifique piège. Un trompe l'oeil dont les pans s'effondreront sitôt tendra t-il le bout de ses doigts. Le velours de sa peau deviendra alors un givre brûlant qui accole l'acier. Le havre de son coeur deviendra un nid de peste et de choléra, une infection qui lui bondira au visage, qui lui crèvera les yeux. Une méfiance hostile cuit ses pensées. Une sombre paranoïa vient lécher les derniers instincts qu'il couve, des instincts survivants, armés jusqu'aux dents, qui ont bâti un refuge de bric et de broc au coeur des hallucinoses.

Ses hanches glissent sur les siennes. Cela pourrait être un reptile, au cuir doux comme une couleuvre. Cela pourrait être un organe fuyard, glissant en tapinois sur l'onde de sa peau éviscérée. Cela pourrait être la hure effilée d'un charognard cosmique, venu renifler s'il restait quelque chose à manger sur sa carcasse vide. Sa carcasse béante, vidée de ses tripes et de ses élans. Il pourrait ouvrir les yeux et défier l'entité ancienne, l'horreur étrange. Il pourrait lever les paupières et Voir. Mais il sait ses yeux viciés, il sait ses yeux parasités. Il sait que de minuscules mandibules mastiquent les filaments de ses iris, que de petits abdomens larvaires fourmillent dans le noir douillet de ses prunelles. Il les sent, qui grouillent, qui rognent et qui mitent. Ouvrirait-il les paupières qu'un bouillon noirâtre s'en écoulerait.

Il garde les yeux clos, les paupières crispées comme des étoiles. Ses autres Sens sont plus fiables. Il croit. Un chapelet de doigts courent sur son front. Des lèvres charnues bourgeonnent au bout des siennes, et les traits de son visage se détendent imperceptiblement, et il se meut légèrement à son encontre, et sa nuque se délasse. Un élan d'éther de son corps qui s'émancipe. L'écho d'un souvenir encore chaud, qui se diffuse dans sa moelle épinière. Peut-être les crocs du piège qui se referment. Mais voilà que des notes tièdes viennent caresser son tympan ivre de Vide. Des mots aux vibrations sucrées et oblongues. Du bout de ses mains, qui séjournaient dans ses reins, il remonte les pentes de son dos, franchit les reliefs doux de ses omoplates-nevées, et ses doigts viennent escalader les lignes de son visage, si proche, dans un contact furtif comme un filet de pluie. Il reconnaît, les méplats et les traits qu'il a contemplés mille fois. Il reconnaît, ce toucher de pêche des vergers. Il reconnaît, le fourmillement de ses cheveux, filament de cuivre, qui rayent doucement le dos de sa main. D'un pouce, il souligne sa lèvre inférieure à la pulpe pleine. Alors, il ouvre les yeux, si brutalement que ses paupières semblent des pierres à feux. Si brutalement, qu'il semble un dormeur jaillissant d'un cauchemar. Qu'il semble un guerrier prêt à se fondre dans l'horreur, et qui profite d'une seconde de folie, d'inconscience pour prendre son élan. Et elle est là. Et elle sourit.

Il sourit, lui aussi. Avec quelques secondes de retard.

- Bonsoir... ma Lanterne. Il murmure, dans le bain tiède de leur peau-à-peau, dans l'alvéole de leur proximité. Ses sens sont autant de tournesols avides de sa vision, se dorant sous les ondes qu'elle dégage. Il ne répond pas aux sourires en dents de scie, qui éraflent son échine. Ni aux yeux hagards qui s'exorbitent, dans son angle mort. Elle le polarise. Son sourire est un agrume gorgé. Il s'y accroche, du bout de ses perceptions tâtonnantes. Il prend un pari fou, plutôt que de rester terré dans sa méfiance sclérose. Ses doigts roulent dans sa nuque fuselée. Il penche légèrement la tête de coté, à sa remarque, un sourire d'Ombres au bout des lèvres.

- J'aime les risques, moi. Surtout ces Risques là, souffle t-il, glissant une main dans sa chevelure qui flamboie de manière plus éclatante, dans les bleus du crépuscule, l'attirant tout entière dans le coulant d'une épaule afin qu'elle y cascade en silence. Encore faut-il que tu sois réelle... Je crois que j'ai un Doute. articule t-il, et ces mots, qui pourraient sembler enjôleurs, qui pendent bien souvent aux lèvres des bourreaux des cœurs, se parent ici d'étranges blancheurs, d'insondables et lunaires voyelles... Un sourire s'y mêle. Le sourire d'un terrible Illusionniste. Crois-tu que je puisse faire confiance à mes yeux ?
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Message par Diane Mansiac Ven 5 Jan - 23:30

Sous ses mains qui remontent le long du corps du Prince des Brumes, elle ressent la tension qui enfonce les muscles, qui roidit ses membres. Elle n'en prend pas ombrage, la Soif doit encore taillader sa gorge, tout comme elle traverse ses sens juvéniles. Diane garde toujours des réserves dans l'appartement. Elle a de quoi apaiser ce besoin éternel. La Flamme remonte contre Carigän, savourant sa lente reptation, la soie de leurs épiderme qui se froissent et se reconnaissent.

Ses prunelle s'ouvrent à ces nouvelles heures, et il est statue de granit bien que ses paupières soient tiraillées de mille soubresauts. Pourtant, elle le devine attentif aux variations les plus infimes de ses doigts sur elle. Un baiser au goût de nuage de lait, léger et sans exigence. Lentement les paumes de Carigän s'approprient à nouveau les vallons de son dos et divaguent jusqu’à son visage. Elle exhale un soupir de plénitude. Ses lèvres quittent leurs jumelles pour venir embrasser les volets qui dissimulent son regard. Des ailes de fée qui suspendent leur vol pour lui.

Deux gemmes  d'ebene qui la transpercent soudainement. Deux lacs insondables qui l’a supplient de se noyer en leur cœur secret. Enfin le revoilà. Son sourire ne s’étiole pas, alors qu’une paume enlace sa joue, se gorge de Lui. Elle pourrait avoir peur, de son intensité, il n'en est rien.  Malgré les ténèbres qui paraissent le hanter, flirter au fond de ses prunelles,  elle se sent en parfaite sécurité au creux de bras. Il sourit et c'est son monde qui s'illumine.

-Ta lanterne, goûtant le nom au creux de son  palais, alors que c'est toi qui m’apprend tellement sur les mystères nocturnes. -il aime ces risques là, dit il- Tu es  ma sublime tentation, répond elle alors qu'il infuse ses paroles d'un charme unique, lui offrant un miroir elfique.

Elle ploie la nuque, juste un peu. Pour mieux sentir le peigne de ses doigts au creux de son avalanche rousse, accrochant parfois une épingle rescapé de sa coiffure de la veille. Réelle. Faire confiance à ses yeux. Il y a un sens de pierre dans ses paroles. Un sursaut mordant de sa nature de Roi Illusionniste. Elle ne balaie pas sa remarque d'un geste insignifiant. Au contraire. Délicatement, elle lie ses doigts aux siens, entrelace leurs mains.

-Viens avec moi…

Doucement, délicatement, elle l'attire en sa compagnie hors du lit. Des qu'ils retrouvent leur verticalité, sa main libre s’écroule autour de sa taille. Tranquillement, sereinement, elle les guide vers la fenêtre qu'elle ouvre en grand sur la Nuit, permettant à des larmes de pluie de venir s'abimer sur eux. Elle reste silencieuse pendant quelques secondes, se laissant absorber par la beauté sauvage de l'Oural.

-Ton Royaume est magnifique, il te ressemble. Beau, insoumis, insolent. Depuis combien de temps règnes tu ? Je suis réelle, ma Passion. -Son Aura se déploie à nouveau, les recouvre, les dissimule et les révèle. Dans cette cape éphémère, c'est la force des transports qu’il lui inspire, le vertige incandescent, la confusion de ses sentiments qu'elle lui offre, sans rien exiger. Sa force vive qu'elle partage
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Message par Carigän Funéra Lun 8 Jan - 0:06

Sur ses paupières, la pulpe de ses lèvres, qui semblent conjurer les scories dans ses prunelles. Contre son corps, l'étrave de son ventre qui se glisse telle une pirogue indolente. Ses doigts qui parcourent sa joue, aussi légers qu'un triolet de croches s'égrainant sur une portée vierge. Elle est quintessence et plénitude. Elle s'éveille et se délasse comme un félin ensommeillé, la peau encore imprégnée d'une délicieuse paresse. Il essaie de se calquer sur l'aura nonchalante qu'elle dégage, essaie de se fondre dans le sillage qu'elle lui ouvre dans les brumes luxuriantes, il essaie de polariser tous ses sens autour de la chanson de sa peau. Dans son dos, juste derrière sa nuque, grattant ses cervicales, il sent bien sûr la proximité d'étrangetés polaires. Il sent frayer dans les ombres et les lumières trop vives, des monstres bosselés et des innocences difformes. Il entend, râclant le fond de l'air, des notes de crécelles et de xylophones, des foires de mâchoires et de ligaments serpentins. C'est une rumeur de fond, un ressac qui va et qui vient, une mélopée qui pulse irrégulièrement.

Un sourire, à ses lèvres cerise. Un fin croissant de lune, jouant de la balançoire alors qu'elle penche la tête de coté, alors qu'elle lui articule des joliesses à l'oreille. Il est sa sublime Tentation. Des mots qui attisent des énigmes, aux lèvres de l'Illusionniste qui se fend d'un sourire aussi palpable qu'une volute d'encens. Impossible de deviner si c'est là une indulgence contrite ou une sérénité montante qui l'enveloppe d'une telle tiédeur. Il la contemple dans un silence fauve, alors qu'elle l'entraîne à sa suite, hors du lit. Alors que leurs deux silhouettes nues se lèvent dans la pénombre bleutée du crépuscule, dans un silence chuintant, dans un froissis de draps. Elle ouvre la fenêtre, et alors une ondée légère comme une écume emperle les traits de Carigän. Il ferme un instant les yeux pour savourer le baiser de la bruine. Sans réfléchir, il glisse dans le dos de la Flamme, prend la place de son ombre. Ses bras enroulent sa taille tandis que ses mains sillonnent évasivement son ventre, dont les passions dorment à poings fermés, dont les passions soupirent amplement. Il est son manteau d'ombres. Il est son armure contre le Monde, la Nuit et la Brume. Du bout des lèvres, il embrasse son épaule longiligne avant d'y asseoir son visage, scrutant ainsi l'Oural à travers l'écran de sa peau et de sa crinière. Ses mots l'amusent, et alors l'espace d'un instant, elle peut sentir qu'il se détourne un instant du spectacle des reliefs, qu'il joue de la nuque pour mieux le regarder.

- Et toi... mon Feu-Follet. Es-tu sûre de pouvoir faire confiance à tes yeux ? Murmure t-il, et le sourire qui glisse à ses lèvres vibre dans sa voix. Es-tu sûre que les choses sont comme tu les perçois ? N'as-tu jamais eu la sensation fugace de te trouver dans un rêve éveillé ? N'as-tu jamais douté ?

Aucune malice ne se dissimule derrière ces interrogations. Aucune facétie n'anime les mots du Roi des Brumes. La légèreté de sa voix est celle des penseurs et des philosophes dissertant du monde et de ses replis, se contentant de caresser les mystères du bout de leurs pensées sans escompter à les déranger. C'est une question qui semble plus le distraire que le torturer. Une question qui hante et qui frappe les esprits de sa lignée. Depuis combien de temps règne t-il ? Un instant, ses prunelles semblent s'accommoder à des temps reculés, s'écarquillent pour se gorger de lointain.

- Quelques siècles... Trois... Quatre, souffle t-il, semblant trébucher, semblant en proie à des rafales de souvenirs qui les fourvoient plus qu'ils ne l'aiguillonnent. Ou Cinq. Oui. Cinq... Concède t-il. Mais ce n'est pas assez. J'ai encore des millénaires à rattraper. J'ai encore tant et tant de choses à faire... La Sibérie n'est pas assez grande. La pierre de nos montagnes n'est pas assez vieille... La nuit n'est pas assez noire pour ravir l'Illusion. Elle se nourrit d'infini, d'éternité et de vide... Ce monde n'est qu'un amuse-gueule, oui. Ce monde n'est qu'une... bouchée.

Derniers mots qui se ponctuent d'une note carnassière. Derniers mots qui se faufilent sous la lame d'un sourire effilé. Quelques secondes, il songe à toutes les conquêtes qu'il lui reste à accomplir, tout le sang qu'il lui reste à verser, toutes les frontières qu'il lui reste à brûler. Quand une interrogation l'accroche. Il sent autour d'elle se déployer une Aura ombrageuse et creuse. Une Aura comme les ailes d'une corneille immense et psychopompe, qui semble un refuge calfeutré. Sa propre Aura s'estompe, s'incline, vient y faire relâche, et l'Univers se prend à l'oublier.

- Quels secrets courent dans tes veines, mon Incendie ? Es-tu une charmeuse de peau ? Une maîtresse des saisons ? Une semeuse de tempêtes ? Tu es Néonate... Mais ton Aura navigue. As-tu eu plusieurs vies, plusieurs corps ?
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Message par Diane Mansiac Lun 8 Jan - 10:32

La pluie, une fine pluie, délicate et glacée. Elle aime la pluie. Aime ses humeurs changeantes et ses colères foudroyantes. Et cette nuit, la pluie est à peine perceptible, avec pourtant les fraicheurs des premières neiges qui se devinent. Un alto parfait à la chaleur qu'elle a l'impression que son corps diffuse. Illusion. Dans son dos, Carigän se moule contre elle. Devient son reflet sombre. Elle coule dans son étreinte, s'abandonne à ses bras remparts. Elle renverse la tête sur son torse, ses mains autour des siennes, dos à ventre, cuisses à cuisses. Elle pourrait presque voir les teintures de brumes qui s'accrochaient au Roi Sorcier se dissiper, arracher par la douceur cocon qu'ils tissent à deux.  Une question, légère et paisible. Sans asperité mais dont la Flamme devine la portée séculaire. Carigän est Illusionniste. Maitre des Sens et des lois de la Réalité. Dans ce cas, comment être certain de celle ci, quand elle obéit à tous les caprices?  Elle se tait, laissant la Nuit les baigner de sa bieveillance.  Lorsque elle formule sa réponse, celle ci est réfléchie, mais dénuée de gravité ou d'enjeu.

-Je suis ennyeusement pragmatique, tu sais? Pendant des années, j'ai fait de l'Observation et de l'analyse une de mes priorités, quelque soit le vecteur : une situation, une personne, un lieu, un livre. Tout. De manière à ressentir l'ambiance et l'humeur. A pouvoir adapter au plus vite et au mieux ma réponse.  Je n'ai jamais eu besoin de me questionner. Jusqu'à hier, mes seuls contacts avec une réalité modifiée, c'était avec ton Frère et Isabelline. Difficile de manquer les différences... Tu es le premier à m'avoir offert la vision d'une Ilusion qui ne soit pas offensive.  -Un soupire de volutpé alors qu'elle évoque rapidement le Monde sylve qu'il a crée pour eux. - Je risque de devenir une vraie peste avec ca, mon Loup.

Elle est terriblement affammée. De tout. De sa réalité, de ses Ilusions,  de questions, d'envie de le connaitre d'avantage, avec une sincérité et une intensité qui la dépasse presque. Diane réalise qu'ils se sont si peu parlés jusque là. Presque cinq cent ans et il est toujours animé d'une ardeur devorante, d'une volonté de Plus.  L'Amazone sourit. Renverse la tête légèrement pour le regarder. Et dans son sourire, dans son regard, la douceur est matinée d'une nuance plus féroce, sanguinaire.

-J'aime ton Ambition, mon Absolu. Que tu veuilles Tout. Que malgré un royaume florissant, tu refuses de t'y limiter. Je ne pourrais pas aimer un vampire sclérosé, ravi et content de sa situation, aussi satisfaisante soit elle. Qu'est ce que tu considères comme ta plus grande réussite, ce dont tu es le plus fier jusqu'à maintenant?

Elle joue avec son Aura, la fait danser autour d'eux, en essayant de la contrôler,  de ne pas la laisser enfler ou se faire dissimulatrice. Elle ignore encore les limites et les applications concretes d'une telle capacité. Pour le moment, elle ne l'utilise guere que pour se vieillir un peu. Un rire amusé, serein, aux suppositions de Carigän. Diane secoue doucement la tete, tracant une infinité de cercles qui se croisent, s'espacent et se rejoignent sur le dos des mains qui soulignent sa taille.

-Je ne sais pas. Je ne connais même pas encore mon second talent -Il pourra percevoir la note de dépit qui souligne sa déclaration- Si tant est que j'en possède un! Je commence à en douter. Combien d'années faut il en general? -Elle mordille ses levres alors qu'elle etudie les differentes hypothèses qu'il a soulevé- - Humm Non. Je ne crois pas avoir eu de vie antérieure. Je n'ai jamais ressenti cela. Ni Flash, ni connaissance bizarre, ni rien de cela.  Non. Pour le moment, je ne peux que jouer avec mon Aura. Et je suis pas convaincue que cela soit un Don super utile!

Non. La Patience n'infuse pas tout à fait ses elans et son caractère.  Elle deteste devoir attendre. toujours attendre pour tout. Diane etend la main et attrape son paquet de cigarettes qui repose sur la console, juste assez en retrait pour ne pas subir l'humidité de la pluie. Pour la premiere fois depuis leur eveil, une touche de doute, d'hesitation empreint ses gestes. Ses epaules et sa nuque se sont imperceptiblement raidies alors qu'elle allume une cigarette aux aromes mentholées, redeposant le pack près de sa main droite si il avait envie d'en prendre une aussi.

-Cari... J'aimerais faire venir mon cheval d'Angleterre. Je n'avais pas envie de l'obliger à me suivre dans mes diverses errances, il était mieux à rester sur place. Mais... si cela ne te dérange pas, je pense qu'il pourrait etre bien ici.

Un détail logistique sans importance, une question d'une anodine et trompeuse banalité. Qui pour l'Amazone est un gouffre d'implications bien plus serieuses. Qui recouvre d'un drap blanc des considerations encore à peine effleurées.
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Message par Carigän Funéra Mer 10 Jan - 0:24

Au creux de ses bras, elle s'alanguit délicieusement, et les voussures de son dos impriment son torse abîmé par la guerre. A perte de vue s'étend un tapis de mélèzes qui mord les chevilles des reliefs escarpés comme les mâchoires de titans éteints. Leur parvient l'odeur de la résine mêlée de frimas, de tanin et d'humus détrempé. Un brouillard lactescent enveloppe les silhouettes des fûts et des chablis, sculptant d'anonymat les lisières onduleuses. Elle se dit pragmatique, et Carigän demeure un instant taiseux, semblant impacter ce mot au plus profond de son esprit.

Son silence semble en dire long. Son silence se sertit d'un sourire vieux comme le monde et profond comme la nuit. Il écoute, non sans distraction, les éléments qu'elle lui apporte, autant d'éléments qui disent sa soif du visible. Elle est bien trop ancrée dans la Survie pour se questionner. Elle est le prisme de ce qui l'entoure. Elle est un éclat de verre translucide, que le sel du temps n'a pas encore brossé. Elle rutile et miroite. Elle est un tranchant aigu. Elle est un cristal de roche. Devrait-il lui dire, qu'à son sens, la survie appelle à l'aveuglement ? Que la lucidité est une affaire de sauvegarde avant tout, et que la quête des mystères va à l'encontre de tous nos instincts de préservations ? Que la survie et la vérité sont deux aventures incompatibles ? Souvent, depuis son mirador terrestre, depuis sa réalité tangible, le Roi Illusionniste laisse ses pensées goûter un peu à la dérive que lui insuffle les astres, les ombres et les ruptures étranges de l'atmosphère. Il a cette certitude qu'il existe un invisible. Une certitude qui lui caresse aussi légèrement qu'inexorablement la nuque. Mais il n'en pipe mot, alors, offrant à la nuit les notes feutrées de son mutisme, offrant aux Mystères l'aveu de son silence.

- Ta lucidité, se reprend t-il, inspirant un peu des embruns, dans le creux de son cou. C'est sans doute ce qui t'a permis de survivre jusqu'ici, mon Incendie. Mais porter un esprit aussi rigoureux doit parfois relever du fardeau... Peut-être est-ce pour cela que tu es aussi perméable aux mirages des Illusionnistes, pense t-il tout haut, et l'espace d'un instant, il saisit l'attrait que peut éprouver son Cadet pour l'esprit de l'Amazone.

Et puis, alors qu'elle oblique sur les instants de la nuit précédente, sur les mondes qu'il a invoqués pour ériger leur voûte, la pensée de Carigän se cristallise. A la vérité, il s'en souvient à peine. Il était porté par des élans de viscères et d'abandons, il nageait entre des gouffres et des cieux, et il serait parfaitement incapable de se remémorer un fragment de sa génèse. Mais il devine, aux ourlets de ses lèvres, qu'elle s'est laissée aller à une contemplation lascive. Qu'elle a aimé, ce qu'elle a vu. Quoiqu'elle ait vu. Et alors qu'elle se fend de quelque requête à demi-mots, le Roi Illusionniste se dérobe de toute promesse derrière un silence songeur, derrière un sourire qui semble une rune indéchiffrable.

Leurs regards se croisent un instant, alors que la Liane délie sa nuque salsepareille. Il en profite pour embrasser furtivement sa tempe que tamise le crépuscule, qui semble une soie au bleu myosotis. Elle prononce des mots qui caressent ses ardeurs. Dont l'un retient son attention. Dont l'un tricote avec ses pensées. Pour autant, l'atmosphère ne prête pas aux lancinantes interrogations, aussi le Roi Illusionniste se laisse lentement emporté par le vent de ses questions. Des questions si vastes. Des questions vertiges. Son corps est un garde-fou qui lui permet de jeter un oeil sur les abîmes qu'elle lui indique. Fierté ? Grande réussite ?

- Hm... Je ne sais pas, murmure Carigän, et sa joue s’abîme contre le front altier de Diane. Je suis peut-être fier de mon royaume. De chaque territoire conquis et de chaque talent qui prend son essor sous mon aile... de mes rares enfants, qui sont devenus des créatures dignes de la Nuit. Oui... Sans doute. Cela me conforte à ma place, je crois. Je suis aussi fier de mes trophées, des têtes et des scalps qui sommeillent dans mes coffres, des chefs de guerre que j'ai tués, des armées que j'ai défaites et des massacres que j'ai intronisés, et qui ont influé le cours de l'histoire des Hommes... Oui, il y a ça, aussi. Je suis fier des défaites dont je me suis relevés. Je suis fier de la désolation et des cendres, qui souffle le silence là où devraient s'élever des hameaux, des cités, des familles. Je suis fier de l'empreinte que je laisse, partout, tout le temps... Un instant, ses prunelles s’équarrissent. De cette plongée dans les souvenirs, de cette chasse aux éclats qu'il mène, dans la battue de ses mémoires luxuriantes, il en ressort soudain un vague étourdissement qui lui égare les Sens. Et puis parfois, avec du recul... tout cela me semble soudainement très dérisoire, parfaitement vain, voué à disparaître. Tout cela s'embrouille, perd en éclat, devient informe, dans mes souvenirs, explique t-il, mais il n'a nullement la voix dolente des âmes souffreteuses. Il n'a pas le timbre voilé des mélancoliques, des vieillards aux jours finissants. Sa voix est blanche, émancipée, libertaire. Je ne suis pas un homme tourné vers son passé, ma Flamme. Je ne crois pas loger en mon coeur la fierté plus qu'une simple, abrupte et viscérale satisfaction... Ce sont des valeurs que j'ai perdues, dont je me suis lavées. Je suis peut-être trop vieux pour être fier de quoique ce soit, pour me souvenir avec suffisamment de précision. Des fois, peut-être un élan qui s'enflamme. Mais c'est un feu de paille. On oublie tout, avec le temps, tu sais. Même l'Horreur, même les plus terribles virages de notre Histoire, même des images qu'on aurait cru gravé au fer rouge sous nos paupières. Il y a bien trop de choses que j'ai bâties, nourries, portées à bout de bras, et qui se sont effondrées, qui ne sont plus de ce monde depuis longtemps.

C'est son âme séculaire qui parle, saoule de trop de sang, de trop de mort, de deuils à n'en plus pouvoir. Cette marée terrible a pelé son âme jusqu'à l'os, mais au lieu d'accuser l'apathies des âmes canoniques, Carigän se sent au contraire, terriblement léger, désentravé, rendu à certaines insouciances interdites, rendu à une fougue primordiale et bâtisseuse. C'est un cap, un écueil contre lequel bien des âmes s'écorchent. Un écueil qu'a enveloppé sa psychose murmurante. L'Aura de Diane palpite comme un feu de camp, autour d'eux, éclaboussant l'atmosphère de spires et de vrilles. Elle méconnait son autre pouvoir. Fait à peine balbutier le premier. C'est presque une hilarité qui éclate dans l'esprit du Loup, tant le fossé qui les sépare est herculéen. Tant ils appartiennent à des époques arrachées. Elle ignore la candeur laiteuse qu'ont les mots qu'elles emploient. Et les doutes qui l'étreignent sont si précipités, si impulsifs, si piaffant, que Carigän ne peut que sentir son expérience l'enveloppe d'une étrange sagesse. D'un geste tendre, il caresse son ventre fuselé, bruissants d'impatiences.

- Bien sûr, que tu possèdes un autre don. Ton sang charrie du Feu. Je ne te permets pas d'en douter. Nous avons tous deux dons, mais certaines créatures timorées renâclent à se connaître elles-mêmes, à éprouver leurs limites, et ce n'est qu'au décours de terreurs et d'ombres que nous nous révélons... Je ne suis pas inquiet pour Toi. Tu es jeune... Tu es une fulgurance. Tu es la Foudre qui vient de frapper, et le tonnerre roule encore au loin. Tend l'oreille... mon Etincelle.

Ce n'est qu'un chuchotis qu'il verse dans le creux de son oreille, qu'il a soigneusement dégagé d'une bogue de cheveux. La fusion sereine de leurs peaux se fendillent à peine, alors qu'elle se meut pour agripper son paquet de cigarette. Lui n'en fait rien. Plus tard, peut-être. A ses lèvres, il ne veut que les agrumes édulcorés de sa peau. Une requête inattendue se hasarde au bout de sa langue. Et si elle a l'air futile, des plus accessoires, Carigän ne se méprend pas sur la signification profonde qu'elle revêt. Un sourire monte à ses lèvres, alors qu'il sent une tendre cruauté éperonner son esprit facétieux. Ses doigts se mêlent aux siens, de manière à ce qu'il puisse la faire pivoter dans ses bras, aussi souplement qu'un danseur, lui interdisant la dérobade du lointain. Il veut leur quatre yeux confondus. Il veut les lignes de leurs visages s'entrecoupant. Il veut saisir les tirants de son visage. Elle aimerait rester.

- Cela ne me dérange pas, lâche t-il après des secondes infinies, s'amusant de cette terrible litote. Je m'occuperais d'organiser son rapatriement. Nous avons déjà des agents sur place, ils n'auront qu'à se fendre d'un petit crochet aux écuries au moment de nous revenir... Ajoute t-il sans se hâter, des éléments logistiques dont il se moque éperdument, mais qu'il se plaît à soulever pour le plaisir de rôder autour du sujet. Ces quartiers sont rudimentaires, au milieu de la plèbe des apprentis. Aimerais-tu en changer ? Puisque tu restes... Un peu. Ajoute t-il, coupant court aux périphrases et aux allusions, cessant de pérambuler autour de ce qu'elle n'admet pas précisemment : Elle reste.
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Message par Diane Mansiac Mer 10 Jan - 14:17

Dans cette chambre ouverte sur les forets et les roches opalescentes, Diane sent que son esprit est un délié, que les noeuds qui empoisonnent ses reflexions sont tranchés par la présence Forteresse de Carigän, par son sa puissance Excalibur.  Il diffuse autour d'eux un champ de calme, une bulle où rien ne peut les atteindre. Ses paroles se reposent au creux de son oreille, il se tait mais il Ecoute. Et ce silence n'est pas de ceux qui embarassent ou qui moquent. Non. Il devine les mots entre les mots. Il apprend des silences calfeutrés.  Sa peau se dore d'un frisson sous le soleil de ses lèvres. D'avantage, elle se presse contre lui, pour ne rien perdre de Lui.  Il cisèle et offre une pensée.

-Je ne sais plus faire autre chose que Survivre et Fuire, admet elle du bout des lèvres. Ces dernières années ont été une fuite en avant. -Une hésitation qui brise la cadence de ses mots- Pas forcement pour la poursuite de la Nuit, je n'ai pas été vraiment en danger physique avant de rejoindre la Russie. Je ne sais pas exactement ce que je fuyais d'ailleurs.

Elle se sent un peu en déséquilibre sans pour autant vulnérable. Elle n'a pas encore eu le temps de rationnaliser ce qui se passe avec lui. N'est pas tout à fait certaine de le vouloir alors qu'elle porte ses mains à sa bouche pour un baiser fugace. Pour le plaisir gourmand de sa peau à ses lèvres.  Et il y répond par un effleurement de son front alors qu'une cascatelle de questions déborde sous le feu de leurs regards croisés.  Et ce qu'il exprime est un vertige qui la fascine. Une abîme complexe et charismatique. Il se livre à elle, sans garde-fou, sans retenu. Il ne joue pas sur son statut de Roi pour esquiver une réponse. Non. Au contraire. Il s'ouvre et se découvre.  Son attention lui est offerte, sans division.

-Souverain, Sire, Chef de Guerre, Vampire, murmure t'elle- Tant de Facettes taillées dans le Sang et sous la Lune, mon Diamant. Je crois que je comprends, un peu, ce que tu veux dire.  Le Temps prend un relief dont je ne saisis pas encore la portée et tu as choisis de te libérer, au moins peu, de son emprise. Mais si certaine de tes oeuvres ont disparues, d'autres se dressent à leur place. Je suis certaine que ta Griffe s'imprimera encore bien après que la mémoire des hommes aura  failli.

Elle se refuse à décortiquer une à une les syllables. S'immerge dans le tableau qu'il dessine pour elle. Il ne vient pas à l'esprit de l'Amazane de le presser pour des détails plus précis. Elle boit ses méandres, réveillée par sa pensée d'eaux vives. Elle saute d'un sujet à l'autre, sans hâte ni logique. Suivant ses humeurs vagabondes, alors qu'elle lui fait part de sa frustration- De son agacement d'être un chaton au royaume des Tigres! Une ondulation de Sirère endormie stridule son ventre, zèbre son épiderme sous les caresses presque trop légères de ses doigts sur elle. Elle penche à nouveau la tête pour mieux saisir les murmures anges qu'il evoque.

-Je n'ai pas peur.- Une évidence. - Je ne crains pas de me pousser à bout si cela peut me permettre de franchir les limites et les verrous qui me cadenassent. Je ne sais simplement pas quels sont les leviers à appliquer, sur quels points je dois faire pression!

Mais il a raison. Il lui faut faire preuve de retenu. Il lui faut d'abord reprendre son souffle avant qu'elle ne tente de déployer d'avantage ses ailes. Elle refuse de se jetter contre des murs de briques si elle n'est pas certaine qu'il s'agisse de fenêtre encore murées. Avant qu'elle n'aborde un point qui sabre son esprit. Elle le devinait depuis sa sortie des cachots, mais c'est devenue une évidence. Qu'elle ne peut aborder tout à fait clairement. Empruntant un chemin de traverse limpide. Hywel n'est qu'un pretexte. Pas tout à fait. Mais presque. Et Carigän ne s'y trompe pas un instant. Entre ses bras, elle tournoie. Sa cigarette se consume, esseulée alors qu'elle n'en a pas tiré une bouffée, reposée dans le cendrier. Il se plonge dans les courbes de son visage et elle se perd dans les etoiles noires qui hantent ses prunelles. Doucement, elle dégage ses mains des siennes pour venir les enrouler autour de sa nuque. Il évoque une organisation pratique qu'elle entend à peine. Occupée à entendre : Reste. Sauf quand il soulève un point précis.

-Non, surtout pas! Je ne veux pas changer d'aile! C'était affreusement ennuyeux, dans mes premiers appartements.  Il n'y avait personnes ou que des serviteurs qui ne m'adressaient qu'à peine la parole! Horrible!  Tes apprentis sont plus proche en age que la plupart des membres de ta Cour, cela ne les dérange pas que je les regarde étudier, et les quelques prises de bec qui se produisent parfois ne sont jamais vraiment dangereuse! Je suis bien, ici! Je n'ai pas encore pris le temps de décorer ni d'arranger à mon gout.  

Elle ressert l'étreinte d'une de ses paume à la naissance de ses mèches sombres.  L'autre s'envole pour enlacer sa taille. Pour lier leurs bassins. Pour refuser à la Nuit de se faufiler entre eux. Jalouse du moindre pouce de son épiderme.  Son buste se love contre le sien. Sa bouche contre sa bouche- Je reste. Autant que tu voudra que je reste, mon Aurore Boréale.   -Elle se fond contre lui, le plus étroitement possible. -Malgré les vents incandescents qui ont soufflés sur nous, depuis que je suis en Russie, je me sens moins oppressée. Plus libre. Je pense que c'est grace à toi. J'ai l'impression que tu crées pour moi un refuge dans la tempête. Je respire à nouveau. -Elle ne peut retenir un léger rire d'autorision à l'écoute de ses propres paroles. - Excuse moi, Cari. Je te promet que normalement je ne suis pas autant midinette! Ce qui est sur, c'est que je ne suis pas rasassiée. -Elle rompt le conctact visuel et courbe à peine la nuque. Pour venir le gouter du bout de la langue. Pour raviver les senteurs qu'il a semé dans l'incendie de ses désirs. Juste un peu. Pour  capturer son essence en elle. -  Une nuit... ne me suffit pas. Je te veux. Sur tellement de plan différent que j'en ai le vertige à l'évoquer. Si je t'en demande trop, trop vite... Je pourrais le comprendre.
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Message par Carigän Funéra Mer 10 Jan - 22:39

Tout en se pressant contre lui, elle lui décrit les prémices de son éternité comme une pérambulation, comme une trajectoire brodée par le hasard. Fuir et Survivre, dit-elle, cependant qu'il l'accueille toujours plus au coeur de son étreinte qui semble une ronceraie. Elle est une petite renarde découvrant la grande forêt du monde, sans avoir trouvé encore de familiarité dans les grands territoires autour d'elle, qui sont le théâtre de tant d'accolades et de déchirements. C'est le vent, qui l'a porté aux portes du royaume des Illusions. Que fuyait-elle alors ?

- Ton ancienne vie, peut-être... Qui voudrait demeurer sur un territoire stigmatisé par la mémoire de sévices et de servitude ? Je trouve cela sain, de vouloir prendre du champ avec des souvenirs encore fumants, de partir, répond t-il d'une voix d'eau de source, tout en se questionnant sur les expériences qu'elle a pu y faire, tout en se questionnant sur les pratiques esclavagistes du royaume d'Angleterre. S'il en a ouïe parler, il ne s'était jamais intéressé à ces pratiques excentriques, toutes tournées pour combler l'oisiveté et la luxure des âmes venant y séjourner. D'autant plus si ton Sire t'a fait faux bond, te laissant avec des interrogations épaisses, et nul moyen de les élucider... Comment aurais-tu pu renaître là-bas, dans cette stupeur, sous le regard de tes bourreaux et de tes juges ? Tu es un esprit sauvage, indomptable. Tu es une prédatrice... et il est dans la nature des prédateurs de chercher un fief où ils sèmeront la mort, où ils imposeront leurs lois, où la nature les couronnera maîtres. Qu'est ce qui aurait pu te retenir là bas ? Comment était ta vie d'esclave ?

Il sait que Veragän gardait la sienne dans un vivarium. Une petite anecdote, lue dans les rapports de son bras-droit qui n'a pas manqué de l'esbaudir. Et si le ton est badin, défait de toute gravité, l'idée que sa Flamme ait pu être l'objet des lubies excentriques de quelque vieille âme malade, désœuvrée et millionnaire, profils récurrents à la cour de ce Royaume britannique, n'est sans agriffer sa pensée. De manière parfaitement inconsciente, Carigän rebondit sur des confidences qu'elle lui a soufflées la veille, dans la relâche de leurs passions. Il se prend à compléter un puzzle, à glaner des pièces avec lesquelles il pourrait fidèlement se représenter le parcours de vie biscornu qui a fait échouer l'Amazone sur les rivages de son Monde, de son île au coeur des Brumes. Leurs peaux se fendent de jeux murmurants alors que se délient de nouvelles confidences dont l'étrangeté ferait pâlir le Crépuscule. Carigän se rengorge non sans humour, alors qu'elle lui consacre plusieurs titres honorifiques. Il n'est pas là de la fausse modestie. Elle sonnerait faux, à ses lèvres, taillées par l'orgueil et la vanité, coutumières des caprices et des condamnations à mort. Davantage un petit soufflet de son insolence naturelle. Son masque de tyran s'effrite quelque peu par la suite, alors qu'elle évoque son rapport au temps. Alors qu'elle saisit de subtiles nuances.

- J'espère, mon Incendie... J'espère, souffle t-il, alors qu'elle dessine les vestiges qu'il pourrait laisser, dont il aimerait balafrer ce monde qu'il affectionne, aussi insignifiant puisse t-il être. Le Monde ne me suffira pas.

Ses syllabes sont d'éther, portées par des aspirations dont la dimension apocalyptique l'étourdit doucement. C'est une ambition terrible, qui l'étreint. C'est celle des conquistadors et des rois-guerriers, c'est celle des brave-la-mort et des arracheurs de gloire. Si l'humain qui sommeillait en lui est mort, il demeure un Homme, aimanté par la force brute et la guerre, affamé de victoires et d'éclats sonores, de Postérité. Il ne s'épanche guère plus plus avant. Des points de suspension lardent l'atmosphère, alors que ses prunelles chevauchent les vallons et les massifs déchiquetés par des affronts telluriques dont il jalouse le Grandiose. Pour l'heure, il ne souffre nullement de son statut d'homme, car les forces du monde seraient bien incapables de humer les odeurs qui montent de son échancrure, car les forces du monde seraient bien insensibles à sa peau, à son Feu, à sa volupté. Un plaisir coupable qui le reconcilie avec l'insignifiance de sa Nature. Sous ses doigts, il sent le corps de la Flamme, à la fois fauvesse et fauvette, qui s'éveille. Son grain de peau qui se hérisse imperceptiblement alors qu'elle dément toute peur, qu'elle se tord d'impatience. Le Roi des Brumes se fend d'un rire de gorge, rien qu'un écho caverneux qui rebondit contre sa pomme d'Adam. Il se repaît littéralement de l'effervescence, de l'ébullition qui crève tous les pores de sa peau, qui se mêlent indistinctement, aveuglement, à ses soifs et appétits de toute nature.

Elle toupille dans ses bras pour se retrouver à nouveau l'otage d'un vis-à-vis sans échappatoire, d'une fusion à portée de souffle. Elle se cabre alors qu'il évoque un déménagement, tant elle semble se complaire dans la plèbe des apprentis, pour des raisons qu'il peut vaguement comprendre, perçant que la Solitude ne lui sied pas, éveille en elle des angoisses en crochets. Doucement la Flamme s'amarre, et ses mains qui s'accrochent sont des sceaux délicieux, et sa peau qui glisse sur la sienne dilue dans ses os une électricité diffuse, mord ses chairs d'une déflagration fantôme. Rien qu'un écho aux lisières de sa peau. Elle reste tant qu'Il Veut. Elle se sent bien, ici. Moins oppressée, dit-elle. Elle rit d'elle même, se qualifiant de midinette. Un terme qu'il a rarement entendu, et qui lui arrache un éclat aux résonances graves.

- Eh bien si la compagnie de mes apprentis te satisfait, qu'il en soit ainsi ! Lâche t-il avec humeur et dynamisme. Aménage ces appartements comme il te plaira, je les ferais officiellement attribués à l'amie de mon Royaume, précise t-il, tandis que le bout de ses doigts glissent dans la lignée de ses omoplates, de sa colonne vertébrale, pressant la chair jusqu'au relief de ses vertèbres qui accusent les infimes trémulations de ses chairs. J'ignore si tu trouveras à rompre l'ennui qui s'installera, quand bien même quelques festivités approchent... mais il y a un observatoire astronomique, plusieurs bibliothèques, un laboratoire, des serres végétales ou nous cultivons des simples, un hippodrome et un gymnase, un amphithéatre, des thermes, et beaucoup de salles de spectacles... puisque nombre de mes Illusionnistes sont avant tout des Artistes. Enrichis toi, ma Muse. Tant que tu veux. Je ferais en sorte que tu puisses accéder à tous les espaces publics. Une caresse, qui se perd à la périphérie de ses hanches. Une caresse, comme l'aile lourde d'un papillon africain, avant que ses paumes ne se referment plus solidement sur l'arceau de sa taille. Et quand bien même les débordements et les rixes restent exceptionnels... N'oublie pas d'arborer l'emblème de Döj. Cela t'épargnera le numéro de quelques trublions dans l'âme, ajoute t-il, avec un mouvement de la tête, désignant furtivement de la pointe de son menton, revêche d'une barbe de quelques jours, le médaillon amassé sur la table de chevet. Pour aussi fluide que soit le mouvement, ses prunelles se sont un instant réfrénées pour surprendre une lueur du crépuscule léchant le vieux bronze patiné. Un sourire alanguit la courbe de ses lèvres à la pensée de son Bras Droit. Il y a très longtemps, c'est moi qui le portait. Une confidence légère comme le zéphyr, qui filtre à ses lèvres sans les ébrécher le moins du monde.

Bien sûr, d'autres pensées lui viennent de concert. Celle de ses obligations d'une nuit qui promet d'être longue, des tâches qui s'énumèrent lentement au fond de son crâne, au rythme fracassant de rames galériennes. Des pensées qui se voient rognées et mordues par l'incantation charnelle qui naît de leurs peaux mêlées. Une terrible faiblesse lancinante, qui plante un hameçon dans tout formalisme... Une Nuit ne lui suffit pas, à lui non. Il veut plus, lui aussi. Il reviendra, ici. Tant qu'il le pourra. Il verra ces murs se parer, ces draps se colorer peut-être, ces étagères vacantes se peupler de lourds ouvrages. Il viendra, le temps d'une relâche, le temps de quelques heures volées, trouver l'asile du corps et de l'esprit, dans le nœud de ses bras, dans le sanctuaire de ses secrets, dans l'oasis de ses yeux. Et malgré ces pensées rationnelles, qui devraient tempérer ses ardeurs montantes, qui devraient apaiser la fièvre qui revient, il l'embrasse à nouveau. Comme si elle devait disparaître la seconde suivante. Un baiser qui mêle l'urgence au délictueux. Un baiser fougue et éruptif, entrecoupé de mollesse et d'ardeurs. Ses paumes glissent derrière ses cuisses, les empoignant le temps de la hisser, de l'asseoir sur le garde-fou du balcon. Dans son dos, un vertige de granit. A quelques mètres en contrebas, la ronde d'une effraie, la rumeur des ruisseaux et de la ramée ombrageuse. Rien ne la garde de la chute, hormis ses bras férocement ancrés autour de sa taille. Son bassin s'est frayé un chemin entre ses cuisses. Son ventre respire contre le sien. Ainsi juchée, elle lui fait face merveilleusement, sans dénivelé pour altérer la ligne d'horizon de leurs lèvres. Derrière elle, le crépuscule se jette dans la peau diaphane de son dos, ainsi offerte.
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Message par Diane Mansiac Jeu 11 Jan - 15:41

Rompre leur contact? Se défaire de sa présence contre elle? S'éloigner de ses bras magiciens? Hérésie. Ils arpentent ensemble les prémices de son Eternité, les premiers pas d'une route qui l'a conduit jusqu'à lui, jusqu'à eux. Une Evidence.  Il est d'une justesse sans faille.  Son experience, les remous de son Ame, l'attention qu'il lui porte sont les pierres sur lequelles ils construisent leur échange.   Il peut entendre un sourire dans son timbre alors qu'elle lui répond.

-Viktor de Michellis voulait que je reste. Sigvald était l'un de ses plus anciens allié et vassal. Il a  été touché par sa disparition et il m'a immédiatement placé sous sa protection personnelle. Je sais que nos anciens quartiers sont concervés à l'indentique si un jour je voulais y revenir. -Elle grimace et il peut entendre une note de dégout et d'écoeurement profond teinter ses mots- Sauf que la Loi du Royaume impose que je prenne un esclave à mon tour. Jamais. Je ne ferais pas subir ce joug à une autre personne. Et... sur un plan pratique, je ne tenais  aucunement à laisser un humain quasi inconnu avoir accès à ma torpeur un peu trop facilement à mon gout.  Je sais de source sure qu'il y a plusieurs vampires qui ont été atteind de combustion spontannée... Hors de question.

Rien n'aurait pu la retenir. Rien d'essentiel. Aucune attache véritable. Et les amitiés humaines qu'elle a pu nouer durant ces longs mois ont volées en éclat lors de son Etreinte. Devenue Traitresse à sa Race. Non. C'était un long etouffement. Sans compter un  certain cainite qui aurait attendu que Viktor détourne les yeux pour frapper. Elle n'est pas encore tout à fait prête à s'ouvrir sur le panier de crabe de cette période. Par contre ses prunelles s'allument d'un feu tout intérieur et la pression de son corps contre lui se fait plus vive, plus intense alors qu'il eveille sa Curiosité. Son Envie de se découvrir. La bruine s'est assechée et sur leurs peaux, il n'en reste qu'un doux parfum humide. Lentement, les brumes se déchirent et offrent  à leur regard jumeaux le grandiose des reliefs qu'ils dominent.

-Et tu crois que ce Royaume s'offrira à mes griffes? Que je pourrais dessiner mes premiers carnages sur ces terres? Et que son Souverain viendra m'en taillader la voie? interroge t'elle avec un brin de facetie.

Il n'y a nulle flatterie dans les termes dont elle le courone. Il est un maelstrom qui la transporte et la ravie. C'est un destructeur et un batisseur. Il rasera la surface de la terre pour la recréer à sa volonté. A son image. Il en a la Passion et la Soif. Il est une force de la Nature. Un ouragan, un Tsunami. Un ravageur et un Artiste.

-Tu es un Batisseur de Cathédrales. Tu fais naitre les Pyramides et raser les villes pour les ériger.

Leurs découvertes se poursuivent, voguant de sujets en sujets et sa peau l'appelle de plus en plus.  Une volte sans froufrou qui mord son ventre, qui appelle à ployer, qui eclot dans ses veines dans un murmure tentation,  tant elle est aspirée vers lui.   Il rit, et pour ses rires, elle pourrait se damner. Il n'a pas l'air de trouver ses prétentions arrogantes. Ne lui indique pas pas qu'elle raye une frontière qu'elle ne connait pas. Sa bouche s'abime sur lui, sa langue chavire et se perd dans ses dunes.  Il ouvre pour elle les portes du Bastion, élargit le champs de ses pas et c'est un délicieux vertige qui frise ses sens. Tant de possibilités qui sont à portées de désir. Plusieurs lieux attisent sa gourmandise. Elle se hisse sur la pointe des pieds et murmure à son oreille. Mordillant à peine le lobe friandise.

-Les Thermes... c'est en ta compagnie que j'aimerai les découvrir, une nuit où tu en aura le loisir. Le planétarium aussi. Pour le reste... Oui. Je déambulerais pour mieux apprendre ta forteresse. J'aime les bibliothèques et les serres et je ne saurais rester loin des salles de spectacles.  J'aimerai aussi me rendre à Saint Petersbourg dans les nuits qui viennent. Ma garde robe est un peu fine et surtout... Je n'ai aucune robe digne d'un mysterieux Bal Illusionniste, sourit elle, impatiente de découvrir les festivités, impatiente de les préparer avec cette fougue toute féminine. -Si tu le peux, réserve moi une danse, mon Tourbillon.

A nouveau, c'est une demande faussement légère, anodine. Que Carigän peut considérer comme tel si il le souhaite sans que Diane ne le retienne contre lui. Ses mains sur ses hanches. Légères. Délicates, l'aile d'un colibri. Elle relève la tête après sa langue baladeuse, renverse la tête en arrière, chavirant sous les encens qui émanent d'eux, permettant à sa chevelure cuivre de lécher ses mains, offrant sa gorgeà ses prunelles d'onyx. Il achoppe un coup d'oeil au médaillon offert par Döjöödörj, lui offrant un léger conseil suivit d'une pépite de sa vie passée.

-Je ne le quitte pas depuis qu'il me l'a donné, mais je n'ai pas encore eu besoin de m'en servir. Mes échanges avec les apprentis que je croise sont plutot cordials. Est ce que Döjöödörj a du souvent intervenir pour te sortir de ces troubles que tu attisais?

Un baiser l'arrache à toute autre pensée. Un baiser qui l'enfièvre, qui l'enflamme. Ses bras renforcent leur présence autour de lui. La paume à sa nuque enlace l'arrière de sa tête pour mieux le respirer, pour partager la passion de sa bouche. Sa langue vient chercher la sienne, ses dents grignottent sa lèvre inférieure quelques trop brèves secondes. Il l'étreint et la soulève pour la déposer sur la rembarde du balcon. Elle relache sa bouche pour se perdre dans la douceur palpitante de son cou. Il peut sentir son rire fredonner contre sa peau à sentir le vide souverain dans son dos. L'entaille de ses cuisses s'ouvre pour mieux l'acceuillir contre elle, son mouvement se poursuit, arrimant ses jambes à sa taille. Il la retient. Elle redresse la tête après un baiser appuyé pour venir poser ses lèvres aux siennes. Alors seulement, nichée contre lui, maintenue dans l'étreinte de ses bras liannes, elle murmure quelques paroles.

-Je n'ai jamais été esclave, mon Artiste. Ils ont essayés sans réussir. Et en toute franchise, je m'en suis très bien sortie. Presque. Sigvald, en tant que conseiller et ami des jumeaux étaient quasiment intouchable et donc je l'étais aussi. Cela m'a permis d'éviter beaucoup de harassement, en dehors d'une vendetta directement dirigé contre lui. Et encore, l'autre cainite avait un sens de l'honneur bien particulier et ne m'a pas blessé lui même. Une ou deux rencontres un peu désagréables, sans compter Veragän. J'étais plutôt protégée et si je m'étais contenté de cela, je m'en serais sortie avec moins de cicatrices. Mais ce n'était pas envisageable.

Elle s'interrompt, pour détacher la main de sa nuque, pour venir la poser à plat sur son ventre, juste avant la fusion de leurs épidermes. Lentement, elle pianote sur lui, effleure sa cicatrice en dentelles de rose, pour aiguiser la pointe de son mamelon. Puis elle reprend, preférant se concentrer sur les arabesques qu'elle trace sur la peau de Carigän, s'immergeant dans les sensations de soie qui naissent sous ses doigts. Elle le parcourt à nouveau, le rédécouvre, sans impatience. Une navigation languide à peine démentie par ses paroles.

-Est ce que tu as subit d'autres tortures que celles que tu as du enduré enfant? Car ce  que tu as vécu enfant de la part de ta Tribu n'était ni plus ni moins que des sévices déguisés en leçon. C'est ce qui a manqué de me briser. Une "punition" qui n'était ni plus ni moins qu'une séance de torture. Je m'en suis relevée cependant. A peu près.
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Message par Carigän Funéra Lun 22 Jan - 22:24

Il prête une oreille attentive aux éléments de vie qui fusent, aux lèvres groseilles de l'Amazone. Sigvald. Viktor de Michellis. Des noms dont les consonances commencent à lui être familières. Il hausse légèrement un sourcil alors qu'elle lui dépeint les us et coutumes de ce royaume derrière l'horizon. Une obligation de prendre esclave ? Aberrant. Voilà qui ne dulcifie guère son avis très arrêté sur la cours des Jumeaux.

- Quelles étranges pratiques, se contente t-il de murmurer, presque songeur, et si ses mots sont neutres, sa voix pince les cordes d'une ironie flottante. Enfin, c'est davantage un hôtel gigantesque qu'un royaume à proprement parler, se renchérit-il. Pas d'armée régulière. Une garde parfaitement insubstantielle, réduite à surveiller les travers de la valetaille... C'est un amusoir destiné à disparaître. Pour ta gouverne, un nouveau Roi s'est d'ores et déjà emparé de la couronne, par ailleurs. Prévisible. J'ignore ce qu'il est advenu de ce Viktor de Michellis, mais soit il a rencontré son destin, soit il a disparu comme un mystère. Nombre de ses partisans parmi les plus fidèles ont rompu des allégeances centenaires. Le château a été assiégé et incendié... Une toute nouvelle dynastie s'est levée, explique t-il, sans brider le sourire qui lui dévore les lèvres. Une disgrâce qui joue indéniablement en sa faveur.

Le Roi Illusionniste évite d'entrer dans les détails qu'il a lus sur les rapports de ses espions. Il souhaite seulement la tenir au fait des mouvances d'un monde qu'elle a quitté et qui a façonné la vampiresse qu'elle est devenue. Il souhaite seulement qu'elle saisisse que la course du Monde est terrible, que des royaumes tombent régulièrement, aussi inébranlables fussent-ils dans l'esprit de leurs dépositaires. Certes, la chute de cette cour indiffère au plus haut point le Roi des Brumes. S'il a englouti chaque feuillet des rapports, c'est car quelques noms ont piqué de sa curiosité. Heaven Truefaith. Alix Saint-Sauveur. Christopher de Michellis. Cypriän et Heike Silantis. A vrai dire, il rêverait que cette petite guérilla caïnite, qui effuse si loin de son royaume, éclabousse ces éminents personnages qu'il ne porte guère en son coeur. Il serait même tout à fait enclin à proposer un appui discret à cet Ory, un millénaire sorti de nulle part, afin qu'il puisse asseoir de manière écrasante son hégémonie en Angleterre. Ses pensées ne font qu'un furtif détour par les manœuvres politiques qui accaparent son esprit, cependant qu'il revient déjà à Elle. Miraculée sans le savoir. Sa peau a frayé entre les déchirements et les incendies. Les vents qui l'ont portée ont été terriblement amènes. Au point que l'idée même du Hasard semble surfaite.

- Tu es partie au bon moment, ajoute t-il, comme s'il voulait l'interpeller sur la Fortune qui s'est penchée sur son berceau. Et toute à son insouciance, la voilà qui se montre malicieuse, ébauchant la perspective de sanguinolentes razzias aux coins du fief illusionniste. Un profond sourire taille les lèvres de Carigän, qui sent les élans carnassiers pétrir la chair de la Chasseresse. Sa paume imprime longuement sa cuisse cavalière. Nous Chasserons, une nuit, mon Incendie, dessine t-il du bout des lèvres. Mais nous irons Chasser loin d'ici, Annote toutefois le Monarque. Si de tout temps, ses pulsions ont toujours eu la part belle, certaines froideurs logistiques ne lui sont pas étrangères. Loin du Bastion, cependant, car trop de hameaux ont dépéri dans les parages. Nos terres sont redevenues sauvages à des lieues et des lieues à la ronde, au point que les hommes croient ces montagnes damnées. J'ai demandé à ce que les quelques bourgades qui renaissent à peine soient épargnées le temps de se développer. Nous ne chassons que furtivement, dans les campagnes, à l'instar des rôdeurs. Mais si tu aspires à une pluie de Sang... si tu escomptes caresser un Massacre... Nous nous échapperons.

Explique t-il avec sérénité, sentant peser sur ses épaules le sacerdoce du Roi. Quand bien même ne fait-il pas partie de ces caïnites qui méprisent ouvertement les mortels, ils n'en restent pas moins du bétail à ses yeux. Du bétail dont on surveille les affluences et les comportements, dont on préserve le nombre pour prélever, sur le plus long terme possible, un tribut de massacre et de barbaries.

L'idée d'une Chasse Royale en compagnie de la Dryade se fraie néanmoins un chemin dans ses pensées. Un chemin enchanté, magnétique, qui embaume la sylve et le fer, qui tisonne ses instincts de loup. Oui... Il aimerait pouvoir contempler l'éclatée de ses appétits. Le sang gouttant sur sa peau aux nuances de coquillage. Sa silhouette ondulant dans le tumulte, entre les gerbes de sang, entre les jetées de décibels. Il est un bâtisseur de cathédrales, dit-elle. Il aime, cette image architecturale. Elles sont rocs et vitraux. Elles sont pierres de taille et fines rosaces. Ses lèvres aux siennes, il goûte les fragrances de sa métaphore. Un baiser à la note furtive. Un baiser-braise. Un brandon à la chaleur étouffée.

Leurs échanges s'enrichissent, au gré de leurs peaux qui se reconnaissent, et plusieurs requêtes se bousculent aux lèvres de la Flamme. Elle en regorge littéralement, portée par un mélange de fougue et d'insouciance douce. Il s'amuse à la contempler ainsi, débordante, animée par cette ébullition de perspectives, sans même se questionner réellement sur la possibilité de chaque requête. Il l'écoute comme on se montre attentif à des chants, à des symphonies, à l'engouement d'une flûte traversière. Il l'écoute en silence, avec un sourire aux lèvres qui inspire à la fois la tempérance et l'Ombre. Trébuchant sur l'une de ses sollicitations, laquelle réveille le monarque qui ne dort jamais tout à fait.

- Saint Pétersbourg ? Si tu veux, murmure t-il, évasif, une main dessinant des arabesques miscibles dans ses reins. Mais n'oublie pas d'avertir l'Intendance du Royaume. Si on peut sortir librement du domaine Illusionniste, on n'en retrouve jamais le chemin. Un sort de dissimulation enveloppe la montagne ainsi que les forêts environnantes, cela dans le but de fourvoyer les mortels et les caïnites fureteurs. Je ne supporte pas l'idée qu'on entre ici comme dans une auberge... alors j'ai pris quelques... dispositions... un peu drastiques, oh, c'est vrai. Mais je sais qu'elles ne suffisent même pas à nous protéger totalement. Toute intrusion dans le royaume qui échappe à l'Intendance est digne de suspicions. Tout est possible, bien sûr, le Bastion n'est pas une prison... mais nous tâchons de contrôler dans la mesure du possible les entrées et sorties.

Il explique tout cela sans gravité, d'une voix fluide comme l'eau mais qui charrie une note de fer, un parfum d'incontestabilité. C'est une voix d'acier trempée, coutumière des lois, des dogmes et des sentences indiscutables. Il les évoque avec facilité, sans se fermer pour autant aux charmes qui affleurent à la surface de sa peau, sans fermer les yeux sur la délicieuse courbe de sa gorge qu'elle offre à ses prunelles, sent pour autant oublier de se repaître du spectacle alangui qu'elle lui offre. Un baiser-rune sur sa carotide intacte. Un baiser qui remonte jusqu'à l'angle gourmand de sa mâchoire, juste sous son oreille indiscrète. Il décoche un sourire mutin alors qu'elle revient sur les troubles, qu'il attisait à l'époque de Jadis. Et Carigän s'offre quelques secondes. Compulsant quelques souvenirs poussiéreux. Semblant accorder du sérieux à cette question dans le vent.

- Non. Quelques fois, je crois... Dans des situations extrêmement critiques. Lorsque j'étais adolescent. Mais je n'ai jamais aimé l'idée d'être protégé. Un instant, ses prunelles se dilatent, s'emplissent de nuits anciennes. Bien sûr, certains se sont chargés de me remettre à ma place à de nombreuses reprises, et ni Döj ni ma Sire n'en ont jamais rien su. Les troubles naissaient davantage des alliances que je formais plutôt que de vulgaires provocations. J'avais tendance à prendre publiquement le parti de ceux qui m'étaient sympathiques, au détriment d'autres membres de la Cour. J'étais bien trop jeune pour tenir des avis parfaitement éclairés... J'écoutais mon intuition. Je me suis trompé, parfois. Mais Elle m'écoutait. Elle m'avait désigné comme son héritier. Alors chaque parole en l'air avait une impacte terrible.

Sa pensée voyage, effleure des reliefs dentus que le temps a amorti d'alluvions, de sédiments, ne laissant de cette époque qu'un lit de souvenirs polis. Mais le présent palpite au creux de ses bras, et réduit ces souvenirs antiques au rang de pâles distractions. Elle n'a jamais été Esclave. Non. Son baiser n'est pas celui d'une Esclave. Son baiser a des élans sauvages, loge une âme indomptée, récèle une insolence Saphir. Les éclats de son rire sont des touches de hantise, qui roulent sur sa peau et en pénètre les cellules frémissantes. Tout ce qui émane d'elle résonne profondément en lui. De ses mots les plus innocents à ses mouvements languides qui taillent doucement l'atmosphère. Ainsi juchée, ses cuisses s'ouvrent, et il vient à son contact, et il s'engloutit dans la brèche, et contre son ventre se dessinent les lisières dentelées de son intimité. Elle n'est pas une Esclave. Bien sûr que non. Elle n'a même pas peur du Vide qui menace de l'aspirer. Chaque mouvement qu'elle esquisse, tissée de volupté, est un défi lancé contre la Mort. Tous ses sens sont aiguillonnés vers elle, si bien que des questions indolentes qui coulent à ses lèvres, seuls quelques mots le heurtent. Presque. A peu près. Des nuances qui au bout de sa langue claquante, ont quelque chose de terrible. A peu près ? Comment pourrait-elle s'être à peu près relevée quand sa présence est un chatoiement ?

- A peu près ? S'interroge Carigän, lui offrant un regard-écrin. Quand à la bouffée de désir qui le prend soudainement, alors qu'elle presse des détonateurs imaginaires, effleurant ses cicatrices, il la jugule un instant... savourant la chaleur piquante qui monte en lui, mais qui ne la détourne pas complètement de ses Mots. Plus graves qu'ils n'y paraissent. Il sent une corde sensible, sous ses paraboles prudentes. Il sent une horreur, qui pulse encore dans les confins de sa chair. Il sent qu'une blessure la hante, qu'une blessure suppure, qu'une blessure infuse jusqu'à la tonalité de sa voix. Ses bras en contreforts, il caresse son flanc, son épaule. Que t'a t'on fait, mon Âme ?
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Message par Diane Mansiac Mer 24 Jan - 15:19

Sa parole s'ouvre et se libère alors qu'elle écarte les tentures de son passé. Juste un peu. A petites touches délicates. Non parce que la Flamme cultive le sceau du secret, mais parce que ce sont encore des abscès purulents et qu'elle sonde lentement la plaie pour savoir exactement jusqu'où elle purule. Carigän ne goute guère les pratiques moyennageuses des occidentaux et Diane ne l'aime que d'avantage pour cela. Les nouvelles qu'il lui offre, quelques années plus tôt l'auraient absourdis. Presque dix ans plus tard, elle se rend compte que l'évènement la touche beaucoup moins que prévu. Un long baiser au creux de son épaule alors qu'elle trie ses ressentis. Et doit reconnaitre qu'elle ne peut pleurer la disparition du Règne de Viktor. Et le sors des esclaves... Non. C'est un simple souvenir sans affect. Elle leur a tourné le dos depuis trop longtemps. Un point cependant...

-Ma Lame, est ce que par hasard tes rapports mentionne le sort d'un vampire nommé Sebastian Lazlow, demande t'elle avec une lueur d'acier dans le regard et une nuance vipérine dans la voix. Non. Elle ne s'enquiert pas du destin d'un être cher.

Le reste des cainites lui est totalement indifférent et elle ne demande pas d'autres détails. Cette vie n'est plus la sienne et jamais elle n'avait envisagé de retourner en Angleterre sinon pour vider les appartements de Sigvald des affaires qui y demeuraient. Et encore, elle a déjà emporté le plus précieux.  Oui. Il a raison, elle a pris son envol alors que le vent soufflait dans ses ailes. Un frisson. Trop jeune, elle n'aurait pas survécue à l'insurection. Mais déjà, à nouveau, l'évocation d'une Chasse vibre dans son Aura. Elle ne peut oublier l'appel qu'elle a ressenti au coeur de sa Forêt enchantée. Un fil d'Arianne qui tressaille dans ombres les plus sanguines.  Et le sourire du Roi Loup est une vision jumelle. Délicatement, ses paumes embrassent ses joues, plongeant dans ses prunelles passion.

-Oui.... Ho Oui. J'en ressens la Soif. Non pas d'un sang maigrement conquis, mais arraché de haute lutte. De giclées vives et de cadavre encore brulants de vie. Et pourtant... Je ne sais pas si je saurais pleinement en profiter. Je me sens ambivalente. Je suis pas sûre de... -Sa voix s'éteint un peu. Elle ne sait pas comment mettre des mots sur ses doutes. Ho, sur l'instant, dans la pulsion de la curée, aucune retenue, la Chasseresse le devine. Mais juste avant? et juste après? Elle secoue la tête. Ils n'y sont pas encore là. Et la restriction du Souverain est d'un sens absolu.- Oui, tout à fait. Le vivier doit être protégé. Et une zone trop dépeuplée risquerait aussi d'attirer l'attention des autorités humaines.

Elle a du mal à reconnaitre ce ton tellement analytique pour parler d'autres êtres humains. Mais peu à peu, Diane ressent une cassure, une faille qui l'éloigne de plus en plus des mortels. Elle ne peut, et pour être sincère avec elle même, ne veux pas lutter contre. Instinctivement, elle devine qu'il s'agit de sa nature Vampirique qui grandit en elle. Qui mature lentement. Ses prunelles petillent à la simple idée d'une nuit loin du Bastion. D'une escapade avec Lui. De le découvrir sous sa nature la plus Carmine. De contempler plus encore le Vampire qui ourle chacun de ses gestes. De se perdre dans les vapeurs de ses pulsions.

-Où tu voudra mon Loup. Où tu voudras, mes pas seront dans les tiens.


Ils dévient, se retrouvent, sans jamais se quitter, leurs peaux qui s'épicent à nouveau. Ses mains ne peuvent se satisfaire d'un seul lieux de repos et parcourent son épiderme. Pressée contre lui, elle écoute le chant feutré qui le relie à lui. Il se tisse entre eux une intensité pure qui la transporte. Là où la prudence aurait du la retenir, l'Amazone découvre qu'au contraire, elle n'aspire qu'à se noyer dans ce flot que les sublime. Elle a l'impression qu'elle est plus Elle. Qu'il écarte les spectres qui la poursuivent. Ils se connaissent à peine. Ils se connaissent depuis des siècles. Les demandes glissent et tombent, sans que cela n'ait d'importance. Elle n'attend pas de lui qu'il se plie en quatre pour la satisfaire. Leur entente se transcende de bien d'avantage. Un point. Un éclat de rire alors qu'elle relève la tête pour déposer un baiser framboise à ses lèvres. Elle aurait du se douter qu'il avait en place un mécanisme de protection. Mais, l'idée de devoir référer à une tierce personne, autre que Carigän, de ses envies, de ses fantaisies de visiter un lieu ou un autre à sa guise, de devoir prévoir chaque fois qu'elle veux sortir de l'enceinte réduite du Bastion lui est profondement désagréable. C'est une entrave qu'elle aura du mal à supporter sur le long terme. Bien sur, elle s'y pliera si necessaire, mais ce n'est pas une perspective qui la ravit.

-Je ne savais pas! Heureusement que je ne suis jamais sortie du périmettre lorsque j'etais à cheval! Est ce que par hasard le médaillon de Döjöödörj pourrait être enchanté ou quelque chose dans l'idée pour qu'il puisse devenir compas ou boussole pour me guider à nouveau jusqu'à toi? Puisque je l'ai toujours autour du cou? Je ne pense pas partir lontemps, trois nuits, quatre seraient un maximum.

Diane comprend pleinement la nécessité de protéger la place forte et ne soulève pas le moindre mot à ce sujet. C'est là un domaine qui relève pleinement de ses fonctions royales et qu'elle ne saurait prendre personnellement. Il isole le coeur de son pouvoir de toutes intrusions indésirables et au vu de l'embroglio politique qui l'entoure, c'est une démarche logique.  Un baiser. Un baiser qui s'appose sur sa gorge. Il peut sentir sous sa bouche le friselis qui  ronronne sur sa peau. Elle se cabre plus encore. Bascule la nuque pour une invitation plus profonde. Mémoire vive de ses crocs pénétrant sa chair. Soupir de volutpé. Il n'aimait pas être protégé, non. Pas Lui. Ses mains descendent sur ses reins et caressent le galbe de ses fesses, effleurent la chair en clef de sol insouciantes. C'est un Guerrier. Un Combattant. Il évoque la Toute Puissance de sa Sire et l'Oreille qu'il avait.

-Tu pouvais faire ou défaire la fortune d'un des nobles de sa cour simplement par l'attention que tu lui portais ou pas. Ou si tu appréciais ou non le vampire. Cela a du être grisant parfois, mon Vertige. Tu as vécu toute ta vie humaine sous son aile ou elle t'a permis de voyager et de faire tes propres expériences? L'oural est déjà sauvage maintenant, mais je n'ose pas imaginer ce que cela devait être il y a quelques centaines d'années! Son Héritier... mais pas dès ton Etreinte? Elle t'a laissé le temps d'apprendre à ses côtés, surement, avant de placer ce poids sur tes épaules...

Maintenu en trapeziste au creux de ses bras, elle ressent dans son dos les frimas du vent et de la Nuit. Peur? Comment pourrait elle avoir peur, puisqu'il la Tient? Puisque il devient son garde fou? Et ce n'est que dans l'alcove de ses bras, que dans la bulle close que leurs corps forment qu'elle peut laisser s'échapper un peu des fumerolles souffreteuses qui l'empoisonnent encore. Sans un mot, il comprend tout et son bassin se projette vers elle, son ventre s'abime contre le sien. Les mains de Diane reprennent leur pérégrinations, et sa langue se fait mutine. Pour mieux conjurer les images qui renaissent.  Il demande, à mot feutré, qu'elle abandonne ses images voilées. Elle ne ressent dans son questionnement aucune curiosité morbide ou avidité des blessures. Non. Il Illumine la chambre de sa Présence chatoyante. Il la protège de ses propres démons mais a besoin de les connaitre pour mieux les anéantir.  Il lui faut dessiner pour lui les tableaux de son passé.

-J'ai commis le crime suprême, mon Amour. J'ai prévenu Sigvald dès le soir de notre rencontre que je m'enfuierais. Que si je voyais la moindre chance de quitter ce mouroir où nulle possiblité de Vie ne m'était possible, je n'aurais aucune hésitations.  Il ne m'a pas vraiment cru. D'abord parce qu'aucun mortel n'avait jamais réussi, et ensuite parce qu'il avait une pleine conscience de l'amour  fou que je lui portais et pensait que cela suffirait à me retenir. Six mois après, je m'enfuyais.

Elle plonge dans les prunelles Nuit et s'y abreuve. Sa voix ne tremble pas. Elle était celle qu'elle était et ne le reniera pas. Ses paumes s'égarent sur lui, ne savent plus là où elles sont tellement ses sens se fondent avec lui. Les yeux ouverts dans les siens, le monde au dehors de son regard n'existe pas. Pour eux, pour elle, il crée un souffle pur que rien ne peut entacher.

-J'étais tiraillée par deux courants contraires. Mon Amour pour lui, l'envie, le besoin d'être à ses cotés et de partager autant de son temps que possible. Et ensuite, ma nécessité vitale, absolue à ne plus subir le joug et les décisions d'une autre personne. Ou d'une centaine d'autres. Car si seul Sigvald avait un pouvoir absolu, n'importe quel cainite pouvait m'imposer sa volonté dans une certaine mesure. Je n'étais plus maitresse de mes pas. Sans compter que j'ai découvert que j'étais enceinte peu de temps après ma capture. Impossible d'envisager de laisser grandir un enfant dans ces conditions. Si Sigvald m'avait proposé de quitter l'Angletterre, ou m'avait donné les assurances nécessaires que l'enfant serait protégé meme si pour cela j'aurais du le faire adopter, nous aurions suivit un autre chemin. Non. Il a choisi la voie de l'aveuglement. Pas moi. Je me suis enfuie.

Elle s'interrompt quelques secondes. Ca... c'était facile. C'est maintenant que le plus dur est à venir. Elle vient voler aux lèvres de Carigän un baiser brulant. Un baiser sauvage et passionnel. Un baiser d'âme damnée. Un baiser d'âme sauvée. Ses ongles se plantent dans sa chair pour mieux l'attirer plus encore à elle, sans pour autant percer l'épiderme.

-Il m'a trahie plusieurs fois ensuite, mon Ame. J'ai joué de malchance puisque le véhicule que j'ai volé est tombé rapidement en panne. Il m'a retrouvé. Il m'a ramené. Et m'a laissé entre les mains du Tortionnaire du Manoir. Ho, il a été présent à chaque secondes. Mais il n'est pas interposé. Il a laissé Sebastian faire à sa guise. Il a choisi sa loyauté à Viktor de Michellis. Il a permis à Sebastian, un vampire plus jeune que lui pourtant, de décider du sort de son "Esclave". Nous ne nous aimions pas assez. Ou mal. Moi, pas assez pour passer une vie de Servitude à ses côtés et lui pas assez pour s'opposer à la volonté de Viktor. Laslow a commencé les rejouissances juste avant leur torpeur et j'ai eu une longue journée de plaisanterie avant qu'il ne mette réellement son plan à exécution. Et honetement, les sevices physiques ne me touchent plus. Je peux les rappeler sans qu'ils ne m'affectent. Il m'a avorté, ma Lumière. D'une manière pernicieuse, perverse, il a anéanti la vie que je portais en moi. Et Sigvald, présent, n'en a rien vu. Rien percu. Et je pense que cela l'arrangeait. Pas la méthode. Pas la manière de faire, mais que ce problème disparaisse sans que cela ne l'implique. Le plus pathétique? Cela n'a rien changé aux sentiments que je lui portais. Ce n'est que maintenant que je peux voir que c'est sa lacheté et son inaction qui ont permis à Sebastian d'agir librement.


Est ce qu'elle pleure? Peut être. Elle ne sait pas. Ne veux pas savoir. De voir qui est vraiment son Sire, de s'appercevoir combien elle l'a idéalisé pour qu'il se révele aussi faible est une nouvelle torture. Il n'a cessé de la trahir et de l'abandonner, encore et encore. Elle peut maintenant accepter que c'était plus facile de Haïr Sebastian, et sa haine est inextinguible, que de joindre Sigvald à ce sentiment. Elle a mal de voir combien il était indigne d'elle. Son Sire est Mort avant qu'ils ne puissent banir ces ombres. Et ho combien elles ont festoyés chez la Flamme.
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Message par Carigän Funéra Sam 27 Jan - 3:48

La petite Luciole qu'elle est semble accueillir les révélations qu'il lui fait avec une apparente distance. Bien sûr, elle a déjà commencé à cheminer, alors que son éternité balbutie. Son départ délibéré du royaume britannique lui a permis de couper le cordon plus grièvement avec son passé qu'une âme déracinée. Elle est maîtresse de sa Destinée. Elle est une âme pionnière, elle est une sirène de proue dont l'étrave fend les temps comme l'adversité. Ses prunelles sont des frondes lancés dans l'horizon. Du dos des doigts, une caresse sur sa gorge de lionne.

- Lazlow ? Oui. Veragän le connaît bien. Ils étaient voisins de chambrée. Le bourreau du Royaume, je crois. Répond le Roi des Brumes sans ambages, lui lâchant sans contrôle les éléments dont il dispose. Il devine du fiel dans les yeux de son Incendie. Il sent des épines hérissées sous ses voyelles rondes. Il sent du cyanure sous ses lèvres pommes. Un sourire nébuleux caresse les lèvres de l'Illusionniste. Pas Mort. Non. Il a retourné sa veste, il me semble.

Des mots on ne peut plus neutres, alors qu'il subodore un sujet sensible. Et si un sourire torture ses lèvres de serpent, c'est parce qu'il devine que l'ire de l'Amazone sera un ravissant spectacle, qu'elle déchaînera les flammes du purgatoire sur ses détracteurs. Il prédit que la vendetta fera d'elle une créature de destruction, l'apocalypse faite femme, parce que son âme est Déflagration. Une certitude viscérale qui retentit plus encore alors qu'elle appelle au massacre, qu'elle en caresse du bout des songes-ongles les visions incarnates, avant de se rembrunir. Ambivalente, dit-elle. Ou apeurée par ce qu'elle pourrait commettre ? Ou effrayée à l'idée de jouir de l'horreur ? Aveuglée par son Monstre, par la puissance de ses instincts qui sont charbons ardents ? Une caresse sur son ventre, berceau de ses pulsions, de sa Fureur. Son ventre qui abrite un Big Bang. Nul mot aux lèvres-rasoir de l'Illusionniste, pris entre une indulgence tiède et des visions aux vapeurs rouges.

Le Roi a parlé. Il ne peut complètement se dissoudre dans l'Abandon qu'elle lui inspire, alors que son Royaume est au coeur des sujets abordés, alors qu'il est question d'y évoluer. Ces lois et ces rigueurs, il les énonce pourtant sans paraître souffrir le poids de la couronne, le carcan des charges. Peut-être les a t-il appris par coeur, au point de les fredonner sans conscience. Peut-être se refuse t-il à voir Diane comme un danger, et ne se donne nullement la peine de marteler des règles qu'un esprit douteux pourrait falsifier. Il se détourne de ses Peut-Être terribles, préfère se concentrer sur sa peau, qui défile sous ses doigts comme une mappemonde, sur ses lèvres qui perlent au bout des siennes, sur les éclats de rire qui font vibrer sa gorge de notes d'ocarina. Il ressert son étreinte, à cet instant. Car le rire lui va bien, secoue son corps d'une partition d'un tonnerre qui frapperait du bout des doigts.

- Ensorceller le médaillon de Döjö ? Oui... Pourquoi pas... Je crois que cette idée me plaît. Un murmure au gré d'un baiser, abandonné à la naissance de ses seins. Il relève la tête tandis que l'idée continue de cheminer, de se frayer passage dans son esprit. Un sort qui la mènerait toujours à lui. Un sort qui la conduirait à travers les brumes, les mystères, les pièges et les lumières criardes pour toujours, la lui ramener. Il ignore pourquoi cette perspective le séduit autant, pourquoi elle transit son univers, pourquoi elle l'amuse et l'enchante à la fois. Il l'observe de longues secondes, dans le blanc des yeux. Oui, j'aime l'idée. Reprend t-il, dans un souffle fantôme. Je sais qui pourrait s'en charger... Par ailleurs... Ajoute t-il, lui volant un baiser, aussi insolent que s'il capturait un morceau de son Âme.

Les vaudouistes pourraient s'en charger. Eux les maîtres des sortilèges, eux les faiseurs de Talismans. Il en parlera à Döjöödörj, bien sûr. Quand bien même en cette heure, son valeureux bras-droit subsiste à l'état d'ombre pâle dans ses pensées. Elle se cabre et il pousse l'intrusion plus loin encore, avançant dans les angles et les encoingures de son corps, reconstruisant pas à pas l'embrassement parfait de leurs chairs. Il est un esquif mordant sur la grève d'une lagune aux eaux insondables. Le visage de l'Amazone se découpe en contre-lune, comme si c'étaient les Parques qui l'avait tissé à partir d'un bouquet de filins sacrifiés. Elle est d'une curiosité galopante, aussi torrentueuse que les remous qui peuvent animer la peau d'un pur-sang arabe. Devant cette déferlante, il se prend à sourire, se fendant d'une brève oeillade pour son passé, aussi délavé qu'une fresque pompéienne.

- Non... Quand j'ai eu quinze ans, je suis retourné chez les mortels, énonce t-il paisiblement, comme s'il rapportait une fable. J'étais un homme fait. Et les vampires m'insupportaient. Un sourire songeur qui dérive, sur la ligne de flottaison que forment ses lèvres. J'avais besoin de côtoyer mes semblables, et Döjöödörj avait été mon maître d'armes. Je savais manier l'arc et le javelot. Le sabre et la masse. J'avais une furieuse envie de faire la guerre, une soif de conquête et de querelles... Un instant, une réminiscence de guerre vient peupler son imaginaire, et résonne à nouveau le fracas des fers de lance, des os fracturés, des hennissements terrorisés, des râles extirpés. J'ai longtemps combattu pour un khan mongol, avant de devenir l'un de ses généraux... Et puis je suis rentré chez les Illusionnistes après une vie entière de bataille, après avoir dépossédé nombre d'hommes, et une fois que plus fort que moi ne soit venu me spolier à mon tour. Une boucle bouclée. Un cycle... Il manque de trébucher sur ses souvenirs, se rattrape à temps, en un clignement de paupières. Bien sûr, je n'ai jamais perdu contact avec les Illusionnistes. Je leur rendais visite, de manière erratique... Entre deux campagnes. Oui... Ma Sire m'avait désigné comme successeur humain, et cela sonnait comme une Imposture. Mais elle était certaine que je développerais son Pouvoir d'Illusion, et bien des conseillers ont essayé de la dissuader de ses certitudes infondées... qui la faisaient passer pour plus folle qu'elle n'était. Mais elle admonestait à qui mieux-mieux que son Sang me sculpterait à son image. Et plus tard... j'ai hérité de ses pouvoirs. De ses deux pouvoirs. Etrange, n'est-ce pas ?

Le timbre de sa voix est diffus, voilé. C'est une question qu'il s'est posée un milliard de fois. C'est une question qu'il a hurlé à tue-tête, qu'il a ruminé d'interminables nuits durants. Vanabelle était-elle visionnaire, ou n'était-ce là qu'un coup de maître du hasard, qu'une terrible ironie du sort ? Qu'est ce que cette gémellité des pouvoirs devait-elle signifier ? Les siècles ont pansé cette interrogation brûlante demeurée sans réponse jamais. Et Carigän n'en délaisse que plus aisément ce sujet qui ne fait plus que vibrer de rares cordes aigrelettes tout au fond de lui. Tout contre elle, il se tient dans l'univers de son parfum, dans les ciseaux de ses cuisses déployées qui fauchent délicieusement ses reins. Ses confidences sont à l'aune de sa peau qui s'ouvre et s'offre. Plus attentif que jamais, il boit chacun de ses mots. Il oublie la nuit battante et le royaume dont la rumeur bruisse tout autour d'eux. Il lui témoigne une écoute pleine, qui oppose au reste de l'univers un parfait aveuglement.

Et les confidences tombent. Une à une. Repoussant d'un cran nouveau l'horreur à chaque palier franchi. Il pourrait jalouser l'amour qu'elle ébauche à l'égard de son Sire, mais les intonations de sa voix ne prêtent pas à la nostalgie, mais il comprend instantanément qu'elle évoque un passé enterré. Fraîchement enterré. Un passé fraîchement enterré qui ne s'est pas laissé couler de guerre lasse, et qui a estampillé son âme, qui l'a couverte d'abscès et de durillons qui sourdent de concert, en cet instant. Sa voix est un vaisseau fantôme, une porte béante sur ses affres. Sa voix est le souffle de pâles acérés et sinistres. Elle taille dans le vif. Et à aucun moment il ne se dérobe de son regard, accueillant de plein fouet ses confessions.

Un enfant ? Sans doute à un autre instant se serait-il pris à renifler de mépris. Il n'en est rien. A vrai dire, la nature précise des déboires et horreurs qui l'ont sculptée n'est pas aussi poignante que les mots qu'elle utilise, que les ressentiments qui suintent à travers ses tournures, à travers ses inflexions, que les émotions qui étrillent son corps. Un baiser au goût de perdition, au goût de Fléau. Elle semble y chercher de la force, de la vaillance, rien qu'un instant d'insouciance, noyé dans les Sens. De quoi reprendre son souffle avant de se pencher sur le précipice. Et il lui en insuffle, de la force. En cette seconde, il plierait l'échine pour qu'elle tienne debout. En cette seconde, ses bras lui sont une écorce, une rempart, une armure, un champ de force.

Le Roi Illusionniste ignore pourquoi il se sent aussi touché, aussi foudroyé, alors qu'objectivement, rien ne devrait être en mesure de l'émouvoir. Ces confidences sortirait-elle d'une autre bouche qu'il s'en laverait les mains, purement. Mais l'idée qu'on ait essayé de la briser Elle, qu'on ait pratiqué ces barbaries sur son corps, qui est Son sanctuaire à Lui, qu'on ait cherché à briser son esprit, qui est sa Lyre, lui est insupportable. Le moindre crachat à son encontre lui semble de trop. La seule idée d'un vampire, glouton de torture, s'en prenant à elle, sous les yeux de son Sire indolent, bras ballants, lui semble une ignominie. Une ignominie qui n'a pas le charme des hideurs fiévreuses. Une ignominie faible, malingre, souffreteuse, atrophiée. Elle est une oeuvre d'art qu'on a jeté aux ordures. Elle est un diamant qu'on a laissé s'enliser dans une boue épaisse. Et alors... L'Aura du mentor se volatilise. Carigän n'a pas envie d'être Sage. D'être raisonnable. D'être vieux. D'avoir lui-même vécu des infamies devenues monotones. Il n'a pas envie de considérer les choses avec la distance du vampire séculaire qu'il est. Il n'a même pas envie de répéter que le temps fait tout oublier, que toutes les blessures finissent par se refermer, qu'ils ne méritent pas sa Souffrance, qu'elle est trop Belle pour Eux et leurs grenouillages sordides. Sur un coup de sang, il oublie l'espace d'une seconde, tout ce que les siècles lui ont enseigné. La Pulsion bat ses tempes.

- Ce sont des chiens, ma Louve, murmure t-il alors que le silence menace d'exploser, et sa voix est une ombre aux pays des vocalises. Si ses bras dans son dos ne bougent pas d'un iota, lui offrant un roc que rien ne semble pouvoir graniter, ses lèvres effleurent un instant les siennes avec une douceur impie. Une passion tissée par des mains d'archanges. Son front vient un instant s'accoler au sien, de sorte que les lignes de leurs profils se mélangent dans le bouillon du crépuscule. Il murmure. Nous nous en débarrasserons. Dans sa bouche, le dernier mot semble vile, souillé. C'est noble de tuer... C'est une sentence méritoire. On tue des ennemis, des éléments dangereux, peut-être gênants... On tue ceux que l'on respecte. On tue ceux que l'on craint, ceux que l'on haït. Mais les chiens qui mordent, qui nous salissent... On les achève. On les crève, mon Amour. On les crèvera, alors, tous les deux. Et nous ne nous contenterons pas de ça... sait-on jamais que la Mort Ultime nous ait précédé. Nous soufflerons leurs cendres dans un charnier. Nous réduirons leurs descendants en esclavage. Leurs terres et leurs propriétés brûlées jusqu'à ce qu'il ne demeure plus que des friches stériles. Ils ne te saliront plus jamais.
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Message par Diane Mansiac Lun 29 Jan - 15:15

Une question, une seule, qui franchit les ramports de la bouche de la Flamme. Une seule, pour un passé tourmenté. Un passé qui ne l'interesse plus vraiment, sinon pour un point d'exclamation en lame crantée. Une grimace de dégout que la caresse fugitive des doigts de son Amant apaise. Evidement qu'il a survécu. Evidement qu'il a trahit. Néanmoins, pas une autre question ne bouscule leur harmonie. Elle le trouvera par elle même. Il n'est pas mort. Il profite de son Eternité dans quelque terrier. Il en sera débusqué et là... Dans le silence complice qui les unit, Diane a l'impression que Carigän sait. Qu'il pressent le sifflement du fouet et le claquement des balles. Qu'il devine les griffures sanguinolentes qui orneront sa proie. Car il sera Sa proie. A elle. Une nuit. Elle a le temps. Une eternité.

Et avec lui, une chasse dantesque. Une moisson de corps et d'Ame pour rendre hommage au divin guerier qui lui sourit. Une gorgée d'hurlement et de sauvagerie, pour mieux se perdre dans son Aura meurtriere. Elle murmure à son oreille. A peine. Se cabrant contre lui, alors que ces visions atisent son désir et réveillent ses instincts de Reine de Saba. Et sa paume sur son ventre damné, ses doigts sur le redoux de ses côtes ne peuvent l'assagir. Ses griffes s'enfouissent dans les mèches sombres. Sa bouche à sa gorge alors qu'elle l'inspire profondement. Langue féline qui s'aiguise contre sa carotide.

-Ta Muse de Sang et de Meurtre...

La perspective qu'elle pourrait se perdre dans les montagnes de l'Oural sans jamais pouvoir revenir jusqu'à lui ne saurait lui convenir. Un noeud de detresse naissante qu'elle écrabouille sans pité comme elle le ferait d'un de ses talons sur un cafard trop entreprenant. Il lui faut plus. La Flamme sent qu'elle commence à trouver sa place. Que les apprentis tissent autour d'elle un cocon qui la protège. Mais ce qui balaie ces considérations, ce qui les rends plus insignifiante qu'un grain de poussière, c'est Lui. C'est vers ce Vampire de Tempètes et de Brumes, de corail et de douceur qu'elle veux pouvoir toujours retrouver. Plus que son Royaume, c'est dans le lagon de son corps qu'elle veux reposer. Une idée papillon, une idée colibri qui traverse son esprit sans que l'Amazone n'ait la moindre idée de sa réalisation. Après tout, il a sa disposition un vivier de talents divers, de dons enchanteurs... Peut être l'un des vampires de sa Cours, un de ses apprentis, un de ses visiteurs saura comment réaliser ce qui est une prouesse à ses yeux? Il ne la détrompe pas, ne la cloue pas à une réalité morose ou trouve la perspective trop audacieuse. Il goute, savoure la rosée de l'idée. Elle a déjà une parcelle de ses étoiles. Ils se lient. Plus étroitement. Toujours. Carigän n'hésite à peine. Et scelle d'un baiser son accord et la réalisation. Il pourra sentir le sourire soleil sous cette bouche qui l'embrasse avec un abandon enchanté. Un baiser bref et ardent. Un baiser qui exprime les chants impatients de sa volonté.

-Je te le laisserais quand tu en aura le temps alors.

Elle ne précisera pas qu'elle ira voir l'intendant pour son escapade citadine. Ce genre de détails ne saurait avoir la moindre importance. Pas plus qu'elle ne peut préciser quelles nuits exactes la verront loin de la Citadelle. Tout ceci n'est que mercantilisme et Diane refuse de troubler le temps dont ils disposent pour ces bagatelles. Non. Bien plus, c'est son Passé, c'est qui il Est, qui il Etait qui l'exalte et lui font tourner la tête. Il ouvre pour elle le manuscrit de sa vie et c'est une lecture abyssale. Un homme fait à quinze ans, un sage à cinquante. Témoignage de la rudesse des temps. A ces mots, elle regrette presque de ne pas pouvoir connaitre réellement le fracas des armes qui s'entrechoquent, le froissement des armures de cuir l'une contre l'autre, le grondement sourd des sabots martelants la terre trop meubles. Franchement, tranquillement, ses paumes se posent sur lui. Encore. Toujours. Et voguent sur ses cicatrices. Les recouvrent et les adoucissent quand bien sont elles inertes depuis des siècles.

-Mon Guerrier Barbare,
sourit elle, sans prendre réellement conscience de ce que pouvait être un champ de bataille à ces ages là. Les morts n'étaient pas propres et s'arrachaient de hautes luttes. Ce qu'il révèle ensuite agrandis ses yeux de suprise. Heritier Humain? Sans même connaitre ses Dons? Sans même savoir si son esprit survivrait à l'Etreinte? Dans les creux de ses mots, une fissure. A peine perceptible mais pourtant bien présente. Quelque chose qui n'est pas tout à fait au repos malgré le temps qui pèse dessus. Elle attire la tête de Carigän contre la douceur de son épaule. Lui offre une imensité de repos. De calme et de paix. La tourmente qu'elle croit ressentir, elle la refuse. Ce n'est pas sa place.

-Ta Sire devait avoir des talents de prophetesse, pour se lancer dans un tel pied de nez aux coutumes vampiriques, reflechit elle à haute voix. Sans compter la gemmelités des Dons. -Elle n'aurait pas du, mon Etoile Polaire. Elle n'aurait pas du t'imposer un tel poids. Elle aurait du attendre au moins que tu sois Etreint. Je crois que j'aurais essayé de t'assassiner durant l'une de tes campagnes de soldat, si j'avais été l'un de ses courtisans. J'aurais engagé des mercenaires pour te faire disparaitre et ensuite... qui pour blamer la lance d'un ennemi? -Son étreinte se ressere. Comme si elle pouvait éloigner des menaces qui n'existent plus depuis des eons. Qui n'ont peut être jamais existés d'ailleurs. -Elle t'a mis en danger de manière inutile. -La Flamme se souvient de ses paroles un peu floues sur ses infants. Certains morts, certains vivants. -Est ce que tes Infants encore sous la Lune possèdent tous le don d'Illusion? Tu as déjà choisi ton héritier ou pour l'instant aucun d'eux ne te satisfait pleinement?

La roue tourne et vascille. Les murmures sur sa Sire appellent ceux sur le Sien. Délicatement, à petites touches vipérines, elle explore pour lui les canyons de son passé. Parcours mains dans la mains les zones tourbes de sa vie avec Sigvald. Peau à peau, elle les entraine dans les sables mouvants de ses blessures. Elle explore pour lui les bayous de ses failles. Et prend conscience qu'elle en veux autant à Sebastian qu'à Sigvald. Qu'elle a eu besoin de la Haine dévorante qu'elle portait au tortionnaire pour se tenir debout. Les yeux de Carigän ne l'ont pas quittés. Il est avec elle. A chaque syllable et chaque intonation. Dans ses bras, elle tremble. Un baiser entre deux tableaux. Un baiser fondation. Un baiser qui redresse les murs de sa volonté. Un baiser qui la reconstruit contre lui. Avant qu'elle ne les noies dans le Styx. Avant qu'elle ne les submerges dans les immondices purulents. Diane est défaite dans ses bras.

Il murmure. Il murmure avec une puissance dans les bras qui la relève. Il murmure avec un hurlement au fond de la gorge qui la lave. Il murmure avec dans les muscles des élans de faux et de moisson. Il murmure et il la reconstruit. Son front contre le sien. Il l'éloigne des horreurs pour lui offrir un futur impitoyable. Pour lui promettre une curée. Pour lui présenter une arme impitoyable. Et surtout... une révélation. Elle sait. Il a une passion qui aurait lancé les bateaux à l'assaut de Troie pour Recupérer Hélène. Jamais, jamais jamais il n'aurait permis que son Amour souffre de cette manière. Il aurait tout brisé tout autour de lui. Mais rester passivement? Dans la sauvagerie de ses élans, Diane sait qu'il n'aurait jamais toléré. Que le monde serait tombé en cendre avant qu'il ne rende les armes. Et c'est cette Passion. Cette Passion intense et sans limite qu'elle recherche. Cette Passion qui répond à la sienne. Dont elle a besoin. Sigvald... en était tragiquement dépourvu. Il l'aimait, mais sans la Passion suffisante. Dans le calcul des avantages immortels. Elle renait dans ce feu de massacre. Et dans cette attitude, elle retrouve son souffle. Elle empaume ses joues et murmure contre ses lèvres.

-Non, mon Âme. Non, mon Amour. Mon Sire est déjà mort, il a déjà connu sa Mort Ultime, il n'importe plus. J'ai hérité de sa fortune, de ses grimoires et d'une partie de ses propritétés. Le reste ne m'importe pas. Et Sebastian? Mort? Non. Pas mort. Promet moi, mon Divin Archange. Promet moi qu'il trouvera sa place parmis tes morribonds? Promet moi qu'une de tes geoles les plus profondes, les plus oubliés porte son nom? C'est là que je le veux, mon Tout.

Sa Passion. Cette Passion. Diane le regarde, plonge dans son visage, se perds dans ses prunelles d'encre de chine. Il est Là. Pour elle. Un baiser doux et léger sur ses lèvres de neige. Ses doigts l'effleurent et s'impregnent de lui. Elle lui sourit. Et Sait. Sans le moindre doute, dans une limpidité miraculeuse.

-Je t'aime. Je t'aime Carigän Funéra et je me moque de ceux qui diront que c'est un élan dérisoire. Je ris de ceux qui diront que c'est là un caprice de néonate pour la puissance d'un Roi. Tu vaux plus que cela, mon Âme. Et je vaux plus que cela aussi. Dans dix siècles, ils seront poussières et je t'Aimerais encore. Je me moque de ne te connaitre que depuis un frisson de secondes. Je me connais. Je t'aime. C'est toi que je cherche depuis mon Aube. Où etais tu, mon Amour?
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